Il y a peu de temps encore, quelques mois à peine, le Parti libéral du Québec était fini électoralement, épuisé de ses 10 années de gouverne et écrasé sous le poids des accusations de corruption. Le gouvernement Charest s'en allait vers une débâcle électorale humiliante, du genre de celle dont les libéraux fédéraux ne se sont toujours pas remis.

Après quelques mois de manifestations étudiantes et de retard dans le programme d'étude de quelque 35% des étudiants québécois, voilà oubliés tous les crimes et toutes les tares de ce gouvernement.

M. Charest, ses ministres et leurs supporteurs du milieu des affaires ne pouvaient imaginer meilleur scénario même dans leurs rêves les plus fous. Les voilà passés de sinistres mafiosi à défenseurs de la majorité silencieuse contre tout ce que le Québec compte de gauchistes, anarchistes, syndicalistes et péquistes. Il aura réussi le pari de faire passer les trois associations étudiantes pour des groupuscules d'anarchistes.

Pourtant, il y a encore peu de temps, ces mêmes anarchistes étaient signataires d'une entente avec le gouvernement, une entente qui en fait ne leur donnait rien de ce qu'il demandait sauf qu'elle leur permettait de sortir du conflit sans perdre la face. Or, le premier ministre et la ministre de l'Éducation, tellement surpris de cette entente, font tout pour la torpiller (les étudiants n'ont rien gagné, le gouvernement n'a rien cédé). Pouvaient-ils faire mieux pour faire avorter cette entente? Non seulement il ne fallait pas d'entente, mais il fallait que le peuple croit à un climat d'insurrection.

La ministre de l'Éducation démissionne (elle aura tout essayé même si en aucun moment, le gouvernement n'aura daigné accorder aux étudiants une rencontre au sommet en présence du premier ministre), la nouvelle ministre tente une dernière et fausse tentative de négociation, les divers ministres parlent d'anarchistes qui veulent non seulement renverser le gouvernement, mais attaquer le système capitaliste (rien de moins). Et voilà que le premier ministre sort une loi d'exception qui met de l'avant des moyens sans précédent depuis l'époque de la grande noirceur. Tout est maintenant en place pour des élections d'ici quelques mois (à la fin du mois d'août ou au  début du mois de septembre) et pour un autre mandat de quatre ans aux libéraux corrompus. Le peuple, on le sait, n'a pas de mémoire. Il n'a que des émotions. Décidément, Machiavel n'aurait pu faire mieux.