Selon une publication récente de ForestEthics Advocacy, groupe opposé à l'exploitation des sables bitumineux albertains, les Canadiens bénéficient très peu de la production de cette industrie, car la majorité de l'industrie est détenue par des intérêts étrangers (voir « Les sables bitumineux profiteraient aux étrangers », La Presse, 10 mai).

Pourtant, la grande majorité des économistes, des politiciens et des citoyens sont en faveur de l'investissement direct étranger (IDE), soit les investissements d'entreprises étrangères au Canada. Voyons pourquoi.

Les IDE sont un jeu où les acteurs économiques des divers  pays en cause sont tous gagnants. Ceux des pays d'où proviennent les investissements y gagnent, car ils ont trouvé une façon de faire fructifier leur épargne et leur expertise, et de diversifier leurs risques.

Pour le pays qui reçoit les IDE, les avantages sont multiples. Premièrement, on importe des technologies et des expertises souvent non disponibles sur place. Ces importations permettent d'augmenter la productivité, d'acquérir des expertises qu'on ne trouve pas localement et, souvent, de produire des biens qu'on aurait de la difficulté à produire de façon autonome.

Deuxièmement, les étrangers apportent leur propre épargne et financent eux-mêmes l'investissement. Ainsi, on libère de l'épargne locale, qui peut servir à financer d'autres investissements rentables.

Troisièmement, les entreprises transnationales qui s'installent dans d'autres pays arrivent avec leurs réseaux de distribution, leurs marques de commerce déjà établies. Finalement, les risques reliés à l'investissement sont supportés par les étrangers, un facteur non négligeable quand on songe aux nombreux investissements qui paraissent au départ attrayants et qui tournent mal.

L'investissement direct étranger, c'est Ubisoft qui emploie des centaines de travailleurs à Montréal ; c'est Toyota qui emploie des centaines de travailleurs en Ontario ; c'est Walmart et Ikea qui font de même partout au Canada en fournissant des biens à des prix qui permettent aux familles les moins riches de consommer sans s'endetter. Et presque tous ces emplois sont occupés par des Canadiens.

Qui ne rêve pas qu'Apple, Google, Boeing ou d'autres entreprises étrangères viennent s'établir ici ? Peut-on penser qu'on pourrait reproduire leur succès par nous-mêmes ? Si c'est si facile, pourquoi ne le fait-on pas ? Produire du pétrole synthétique de façon écologique et profitable à partir de sables bitumineux n'est pas non plus une entreprise aisée. Les expertises dans ce domaine se retrouvent partout sur Terre. Pourquoi ne pas en profiter ? Il est bon de rappeler que succès économique extraordinaire de la république d'Irlande de 1980 à 2008 (avant la catastrophe causée par la bulle immobilière) a largement été basé sur l'arrivée de compagnies étrangères.

Pourrait-on produire du pétrole en Alberta sans l'apport des entreprises et du capital étrangers ? Sans doute. Mais serait-ce une bonne idée ? Sans ces apports, on peut certainement présumer que l'industrie serait plus petite et moins performante et qu'elle générerait moins d'emplois et de salaires, moins de revenus de taxation et de redevances, etc.

L'économie canadienne est ouverte. Cela signifie que nous avons la chance de pouvoir échanger avec le reste du monde, en important et en exportant des biens et services. Nous profitons certainement de ces échanges pour augmenter notre prospérité. Les échanges portent aussi sur du capital et de l'expertise, et les bénéfices qu'on en retire sont aussi tangibles. Hé oui, les étrangers y gagnent lorsqu'ils font des investissements au Canada. Sinon, pourquoi viendraient-ils investir ici ? Ce qui est vraiment important, c'est que les Canadiens y gagnent aussi.