Plusieurs s'inquiètent, à travers le monde, de l'issue du second tour de l'élection présidentielle française. Selon les derniers sondages, le socialiste François Hollande arrive en tête contre le président sortant Nicolas Sarkozy et a donc toutes les chances d'accéder à la présidence, dimanche.

Les principales places boursières du monde ont mal réagi à la victoire de M. Hollande au premier tour la semaine dernière, y voyant la possibilité de remise en question des mesures d'austérité et de discipline budgétaire adoptées par 25 des 27 pays de la zone européenne en février dernier.

François Hollande l'a effectivement dit et répété aux Français durant la campagne présidentielle. Il veut notamment renégocier le pacte d'austérité piloté par son propre président et la chancelière allemande Angela Merkel. Renégocier, mais quoi au juste? Et quelles sont les chances que le nouveau président arrive à convaincre ses homologues européens d'y adhérer?

François Hollande veut d'abord donner plus de tonus au Fonds européen de stabilité financière qui bénéficiera d'un nouveau rôle de la Banque centrale européenne, plus orienté vers la croissance économique et l'emploi. Son prédécesseur a tenté en vain, pendant plusieurs mois, de convaincre la chancelière allemande et d'autres dirigeants européens d'adopter cette direction, que je considérais tout à fait sensée, mais sans succès. Les chances que M. Hollande y parvienne aujourd'hui sont très minces.

Secundo, le candidat socialiste souhaite pouvoir convaincre les pays de la zone euro d'appuyer la création d'euro-obligations pour mutualiser le risque entre les pays de la zone. Encore une fois, c'était une excellente idée, mais débattue sans succès par Nicolas Sarkozy et d'autres leaders européens.

Enfin, M. Hollande remet en cause la cible de déficit structurel des pays de la zone qui ne devrait pas dépasser annuellement 0,5% du PIB. Le chef de la diplomatie allemande a accusé une fin de non-recevoir à cette possibilité la semaine dernière.

Tout cela annonce un bien mauvais départ pour le nouveau président français, alors que l'essentiel de ses engagements quant à la crise de la dette et la politique budgétaire européenne, légitimes et valables certes, frappera néanmoins un mur politique.

Si ce n'était que de l'inconfort de M. Hollande, cela ne ferait même pas un pli à l'Histoire. Mais il y a plus dans les circonstances.

J'écrivais en octobre dernier, en ces pages, qu'il fallait craindre que les engagements pris pour sauver l'Europe ne souffrent de l'écrasement du leadership européen, face à des Merkel et Sarkozy impopulaires à quelques mois des rendez-vous avec leurs électeurs. Et c'est précisément ce qu'il faut le plus craindre maintenant.

Si François Hollande est élu dimanche, il voudra entreprendre des négociations avec les pays de la zone euro dès le lendemain. Il pourrait s'ensuivre une période d'incertitude et d'instabilité à un moment où l'Europe n'en a vraiment pas besoin, à un moment où plusieurs des pays membres sont déjà en récession ou s'y dirigent. Une instabilité qui ferait souffrir davantage les Européens, mais qui risquerait également de compromettre une reprise encore fragile dans les principales économies du monde, sinon les précipiter eux aussi dans une récession.

M. Hollande savait dès le début de la campagne présidentielle qu'il avait plus de chances de frapper un mur que de convaincre les autres pays de la zone euro, comme observateur plus qu'averti des discussions entreprises depuis plusieurs mois. Mais il a sans doute préféré entretenir les Français de choses qu'ils voulaient entendre et gérer la crise, qu'il pourrait lui-même exacerber, plus tard, après la présidentielle. Cela s'appelle de l'inconséquence ou de l'irresponsabilité, à votre convenance.

Rien n'est cependant encore joué pour lui. L'exemple récent du Wildrose en Alberta est là pour nous le rappeler.