Le milieu de l'itinérance a subi un coup dur la semaine dernière en apprenant qu'un important projet du Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), financé par du financement fédéral, ne sera pas renouvelé.

Ainsi, la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance (SPLI) finançait depuis plusieurs années un projet qui visait à se pencher sur des enjeux jugés prioritaires par la planification régionale. Celui-ci avait d'ailleurs été approuvé par le comité régional et un comité fédéral-provincial.

Cette situation est choquante et incompréhensible : malgré le fait que le projet est reconnu comme prioritaire par l'ensemble des partenaires institutionnels et communautaires de l'itinérance du territoire, celui-ci est interrompu. Ce qui est d'autant plus consternant, c'est qu'ayant franchi près d'une quinzaine d'étapes d'analyse, c'est finalement une décision de la ministre Finley, responsable du programme, qui a eu raison du projet. Ce qui veut dire que même si l'ensemble d'une région détermine ses besoins en matière d'itinérance, la ministre se permet tout de même d'annuler un projet, et ce, de façon totalement arbitraire.

De plus, c'est la première fois en dix ans d'existence du programme qu'un ministre prend une décision qui va à l'encontre des besoins identifiés par les régions et validés par un comité conjoint Québec-Canada.

Si le sort du projet du RAPSIM est maintenant connu, celui de plusieurs autres organismes est fortement préoccupant. Selon l'échéancier du programme, l'ensemble des projets aurait dû être approuvé le 1er avril. Plus d'une centaine de projets ont été renouvelés dans ces délais. Toutefois, au début du mois, le Réseau SOLIDARITÉ itinérance du Québec (RSIQ) a constaté que le gouvernement fédéral avait accordé à certains de ses membres une approbation temporaire (au lieu d'autoriser le projet jusqu'à la fin du programme en 2014) à une quinzaine de projets en cours. Bien que cette façon de faire permette d'éviter des coupes momentanément, cette situation également inédite depuis la mise en place de la stratégie a semé une véritable inquiétude au sein du réseau. Depuis ce moment, la situation s'est partiellement résorbée, mais il reste toujours près d'une demi-douzaine de projets en attente de renouvellement.

Il  est d'autant plus inquiétant que les approbations qui tardent à venir sont celles du bureau de la ministre Diane Finley. Cette situation crée donc son lot de stress chez le personnel et les personnes qui fréquentent les organismes puisque rien ne garantit qu'au-delà de la prolongation temporaire octroyée à ceux-ci, les projets recevront le financement auquel ils ont accès depuis plusieurs années. Le cas du RAPSIM témoigne du fait que la ministre Finley ne se gêne pas pour signer l'arrêt de mort de projet, même si ceux-ci sont priorisés par les acteurs concernés par l'itinérance du territoire.

De plus, d'autres projets sont également en attente de recevoir les approbations conditionnelles à leur financement. En effet, une vingtaine de nouveaux projets qui auraient dû voir le jour le 1er avril sont toujours en processus d'analyse, ce qui n'est pas sans affecter le milieu de l'itinérance.

Des conséquences importantes

Le retard dans l'approbation des projets a donc de nombreux effets pour les personnes à risque ou en situation d'itinérance. En effet, un délai dans l'attribution des sommes engendre des coupes de services, met en jeu le déroulement ou menace carrément la viabilité de projets qui auraient dû voir il y a déjà quelques semaines. Ainsi, la situation entraîne une perte d'expertise et de temps important. Dans le contexte où l'itinérance est fortement préoccupante dans la plupart des régions, où l'accroissement de l'itinérance et la complexification des problématiques mettent une pression déjà énorme sur les organismes communautaires, l'approbation des projets est plus pressante que jamais.

Cette première entrave aux planifications locales et québécoises coïncide avec la présence d'un gouvernement conservateur majoritaire. En effet, la ministre Finley, responsable du programme depuis plus de cinq ans, se permet pour la première fois de mettre fin à un projet de son propre chef. Pourtant, une entente Québec-Canada stipule «  que le Canada reconnaît que la mise en oeuvre de la SPLI doit s'inscrire dans le respect des compétences, objectifs, priorités et structures d'organisation des services du Québec... ». La situation actuelle semble plutôt montrer que la partie fédérale, par le refus de renouveler un projet, ne reconnaît malheureusement pas les priorités des collectivités du Québec.

Le programme SPLI se termine en 2014. Présentement, nous ne connaissons aucunement les intentions du gouvernement fédéral à cet égard. À voir la conduite du gouvernement depuis que le parti conservateur a atteint sa majorité à la Chambre des communes, la population québécoise peut s'inquiéter de ce qui adviendra de cet important financement, lequel fait pourtant la différence pour l'itinérance dans notre province.