Nous avons reçu plusieurs réactions au texte d'opinion de Rima Demanins, intitulé «Québécoises, chacune à notre façon», qui a été publié samedi le 14 avril. En voici quelques-unes.

Inégalité et inconfort

J'ai trouvé fort pertinente la réflexion de Mme Demanins sur le port de l'hijab au Québec. Il est toujours rassurant d'entendre des propos d'ouverture, d'acceptation et d'appartenance à sa société. Je ne peux qu'être sensible à la sincérité de cette jeune femme et je ne doute pas un seul instant de la véracité de ses dires ni de la parfaite intégration de sa mère et de sa soeur qui, elles, ont choisi de porter l'hijab, librement.

J'aimerais néanmoins apporter deux petites réserves quant au port du voile dans notre société. La première est que je trouve dommage qu'un accessoire vestimentaire, qui dans le passé assurément et parfois encore aujourd'hui, malheureusement, perpétue, en dépit de celles qui le portent librement, en raison de sa forte connotation, l'image passéiste et inégalitaire de la femme. La foi en l'Islam ne saurait-elle pas être défendue avec tout aussi de fierté et de piété par un autre accessoire qui, lui, ne serait pas si sujet à controverse pour les non-musulmans et les musulmans eux-mêmes ?

Ma deuxième réserve est, et c'est un inconfort personnel, que j'éprouve une plus grande gêne à adresser une galanterie à une femme voilée qu'à une femme non voilée. Le désir d'établir le contact se heurte à mon désir de ne pas commettre ce qui pourrait être perçu comme une intrusion ou une impertinence vis-à-vis de ses préceptes, à tout le moins de ne pas perpétrer un geste susceptible de créer un malaise chez mon interlocutrice. Pour faire simple, disons que, dans ce genre de situation, le voile peut devenir une barrière dans la communication, dans la mesure où il instaure un flou quant à la bonne manière d'établir un contact avec une gent féminine qui affiche clairement son appartenance religieuse et, avec elle, ses diktats ou ses valeurs; par exemple préserver sa pudeur en instaurant une distanciation.

Ces deux réserves émises, je réitère mes marques de sympathies aux propos de Madame Demanins, à sa personne, de même qu'à l'endroit de toutes musulmanes voilées qui parviennent à harmoniser leurs croyances religieuses aux valeurs libertaires et humanistes des sociétés d'aujourd'hui. Mme Demanins que vous portiez le voile ou du L'Oréal, je vous dis : assalâm 'aleïkoum ! Vive la différence, l'ouverture, le partage !

Daniel Hardy, Saint-Bruno-de-Montarville

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De mauvais souvenirs

Je ne vous apprends rien en vous disant qu'une grande majorité des Québécois ont été élevés avec une éducation qui a été baignée dans la religion catholique. Pendant longtemps, la religion catholique au Québec était « extrémiste ». Mes parents sont des gens modestes, qu'ils ont su me transmettre de bonnes valeurs à mon frère et moi.  Ma mère et mon père n'ont pas de beaux souvenirs à me raconter du temps passé à l'école. Pourquoi? L'enseignement était donné dans un cadre très rigide de la religion catholique.  Mon père a de très mauvais souvenirs d'avoir eu à apprendre son petit catéchisme par coeur... à coups de règle sur les doigts.  Ma mère n'a pas aimé se faire dire que « les filles n'ont pas besoin d'instruction pour laver des couches », et d'avoir été obligé d'arrêter l'école en 9e année.  C'est elle qui nous a poussés et encouragés dans nos études. Après voir eu une éducation de l'Église catholique « extrémiste », ainsi pour  beaucoup de Québécois (possiblement la dame que vous avez croisée à la pharmacie), il y en a qui ont encore aujourd'hui des petites crottes sur le coeur à cause de l'éducation et des valeurs que l'Église catholique « extrémiste » leur a transmises. Malheureusement aujourd'hui, pour beaucoup de Québécois, les autres religions se retrouvent dans le même bain que la religion catholique.  Ils digèrent mal, dès l'apparition d'un symbole religieux qui prend un peu trop de place ou que les femmes de cette religion sont habillées de la tête au pied par +30 degrés alors que monsieur est en bermuda et camisole.  Et de nous faire réponse « Bien non! Notre religion ne nous impose rien contre notre gré ». Après toutes ces années baignées dans la religion catholique « extrémiste », on ne peut pas demander d'être tolérant... oui, on peut le demander,  mais l'adaptation sera longue.

J. Sauriol, 46 ans

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Des pas à faire

Merci Rima de nous faire, ainsi, connaître votre magnifique famille. Il faut lire votre texte pour nous faire réaliser qu'il y a encore ici au Québec de ces gens «ignorants» de votre situation. Malheureusement, de ces gens mal éduqués (je ne dis pas instruits), il y en a encore; il est à espérer qu'avec de plus en plus d'ouverture sur le monde, nous soyons préservés, éventuellement, de tels propos aussi grossiers. Car, il est vrai, le Québec, ma terre natale depuis plus de 350 ans, est ce «pays» de toutes les libertés. Et j'en remercie grandement la Vie. Bien entendu, nous de «souche», avons dû nous adapter à toutes ces nouvelles cultures venues prendre racine chez nous. Ainsi, vous comme nous, avons dû faire les pas nécessaires pour nous comprendre, pour ainsi nous accepter tels que l'on est. Mais, semble-t-il, que pour certains, encore, de ces pas restent à faire. Bravo, Rima, pour votre engagement vis-a-vis de vous-mêmes, votre famille, votre société qui est à toutes deux la nôtre.

Carole Carignan,  Montréal



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De vieilles blessures


À la lecture de ce texte, je me suis posé la question : pourquoi, nous, Québécois d'origine française de vielle souche, descendant de famille qui vivent ici depuis plus de 300 ans, avons plus ou moins fortement un tel comportement face aux signes vestimentaires ou autres en lien avec une religion, quelle qu'elle soit? Rima, et tous les immigrants récents qui se retrouvent face à une telle situation, vous êtes-vous déjà posé la question pourquoi les Québécois de souche réagissent-ils ainsi face à des signes, qui ne sont sommes toutes aucunement agressant? En y pensant bien, je crois que cela réveille en nous, en tant que peuple, de vieille cicatrices, de vieilles blessures justement relié à l'oppression religieuse que nous avons subi dans un passé pas si lointain et dont nous venons à peine de nous libéré et dont nous voulons resté libéré sous toute formes. Nous sommes passés à autre chose en tant que peuple, en tant que Québécois... et nous nous attendons probablement, et je dirais même fortement à ce que les immigrants respectent, acceptent et s'adaptent à cela dans leur comportement. Les Québécois sont très ouverts aux cultures diverses qui nous enrichissent en tant que Québécois. Mais je crois comprendre, que face à la religion et à tous ses signes, ce n'est pas le cas. Il n'y a rien de raciste, même  si cela peut s'y apparenter. C'est probablement que certains se sentent agressés à divers niveaux, et que cela nous donne une amère impression de retour en arrière. Vous parliez de mascara dans votre texte... À votre âge, au début des années 80, j'ai moi aussi décidé de ne plus pratiquer ma religion après mûre réflexion, justement parce que je trouve que les religions (toutes les religions) ne sont pour moi que mascarade sur plusieurs points. Et je vois les difficultés que certains de nos parents ont encore pour s'en libérer, ceux qui ont vécu cette religion qui s'immisçait dans nos vies et qui avait supposément réponse à tous quant aux comportements, au bien et au mal... Je suis heureux que mes enfants (17 et 14 ans) n'auront pas à faire de choix quant à la religion comme moi j'ai eu à le faire et comme vous, votre soeur, votre mère semblent devoir le faire. En tant que Québécois, nous ne devrions plus avoir à faire ce type de choix. Nous sommes dans une société qui est rendu ailleurs, une des sociétés les plus avant-gardistes et paisibles au monde.

Laurent Beaulieu, Laval

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Malaise partagé

Je trouve votre article vraiment touchant, mais il faut constater certaines choses : le Québec n'est pas un pays. Lorsqu'elle voyage au Liban, votre soeur utilise-t-elle un passeport québécois ou canadien? «Ce tissu qui effraie et répugne tant certains Québécois» est malheureusement imprégné de radicalisme, ce qui est vraiment dommage, puisque dans un pays comme le Canada, la liberté d'expression est un atout. En principe, je suis très d'accord avec vous : le hijab comme tel n'est pas dangereux, mais de le comparer au kippa que les juifs portent serait faire fausse comparaison. (Je ne suis pas juive, mais d'origine catholique). Mes parents et moi sommes nés ici et nous sommes anglophones de souche, qui maîtrisons les deux langues. Malgré tout cela, je me sens comme une étrangère dans ma province natale, puisque ma langue est souvent attaqué. Alors, ma chère demoiselle, je comprends votre malaise. Ceci étant dit, le Canada est un des meilleurs pays au monde.

Joanne Scullion Trudeau



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Vivre et laisser vivre

Le jour que les gens comprendront que le voile est un vêtement et qu'il relève du droit de chacune de s'en vêtir ou non, les préjugés tomberont.  Quelle différence entre cet attribut et une coupe de cheveux personnalisée ou une teinture mauve, bleue, rouge, etc. Toutefois, j'exprime un non catégorique au voile intégral pour des raisons de sécurité. L'objection formulée l'est pour des raisons historiques.  Certaines femmes québécoises reconnaissent en ce voile, un reflet du passé. Je crois qu'elles font erreur. Entre un voile et un slip qui se dévoile à cause d'un pantalon à taille basse, j'opte pour le premier. Pourtant je ne suis pas puritain. De plus, je constate qu'avec un maquillage approprié, une femme voilée peut être particulièrement jolie et attirante. Vivre et laisser vivre, apprendre à reconnaître et accepter les nuances, les différences culturelles. Pouvons-nous espérer?

Yvon Berthelet

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Étroitesse d'esprit

Votre lettre m'a beaucoup touché parce qu'elle reflète une réalité ignorée (sciemment ou non) par mes compatriotes et qui donne lieu au type de réaction xénophobe que vous avez décrit avec tant de justesse. Cette ignorance crasse soulève en moi tant d'indignation que je m'en voudrait de ne pas réagir. Vous trouverez en moi et en de nombreux autres une oreille attentive, sensible aux dérives possibles que cette attitude méprisante engendre invariablement. Je veux dénoncer l'hypocrisie qui se cache derrière la malheureuse réaction de cette dame de la pharmacie. Vous décrivez bien la gêne que qu'elle a éprouvée lorsque vous lui avez dit que c'était votre mère qu'elle venait d'insulter. Il est fort à parier que cette rougeur de confusion arborée devant vous s'est éteinte lorsqu'elle est arrivée chez elle, à l'abri de «l'autre». Ce dont vous avez été témoin à la pharmacie est couramment dit dans les salons des «Québécois d'origine». Des «blagues» à saveur raciste ou xénophobe sont couramment murmurées au cours d'une conversation «entre nous». C'est supposément acceptable de rire de bon coeur de ces énormités. C'est bon enfant de taquiner son ami, son gendre, son beau-frère pour l'inciter à réagir, à exprimer son indignation de laquelle on seraient censé tous rire de bon coeur. Après tout, «ils» ne sont pas là. C'est d'une hypocrisie sans borne! Et gare à moi si j'exprime mon mécontentement un tant soit peu. « Arrête de t'énerver c'est juste une blague!», me diront-ils, rabat-joie de service que je suis. Cette dame de la pharmacie participe de plein gré à cette hypocrisie. Elle était convaincue qu'elle trouverait une oreille «sympathique» en vous puisque vous ne portiez pas le hijab. Dans son étroit esprit l'équation était simple: pas de hijab = Québécoise d'origine = réceptive aux remarques désobligeantes. Pas fort en calcul, cette dame! Comme exemple d'ignorance, on ne trouvera pas mieux.  Pourquoi serait-il acceptable de faire ce genre de remarque ou de blagues? Pourquoi devrions-nous nous sentir mal à l'aise d'en dénoncer l'ignominie «entre nous»? Vous le dites si bien dans le vidéo: «nous sommes vous». Absolument. Vous êtes nous. Sachez, Rima, que je suis aussi insulté que vous. À cela s'ajoute une certaine honte. Celle d'être parfois obligé d'admettre qu'une frange de mes compatriotes est la porte-paroles bavarde d'une autre frange qui, dans ses murmures odieux, trahit mal un relent de colonisé, une étroitesse d'esprit et un désir assumé de ne pas vouloir grandir comme société.

François Trudel De Gagné

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Pas des femmes émancipées

Rima Demanins brosse une image d'émancipation d'elle-même, ainsi que des autres femmes de sa famille. Par contre, je trouve que certains sujets moins transparents en matière d'égalité hommes/femmes ne sont pas abordés.

1) Quand ces femmes vont à la mosquée, ne sont-elles pas relayées à l'arrière ou au sous-sol?

2) Quand elles vont se baigner, portent-elle un maillot de style 1900 avec une cape par dessus pour être certaines de ne rien laisser voir? Les hommes musulmans portent-ils des maillots de style 1900?

3)  Ces jeunes femmes auront-elles le droit d'hériter des biens de leur père?

4)  Une fois mariées, pourront-elles décider de divorcer sans subir l'opprobre de leur famille?

Quand les réponses à ces questions seront les mêmes pour les femmes et les hommes musulmans/islamiques, ces jeunes femmes pourront se dire émancipées. Pas avant!

Pauline Carignan

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Réaction viscérale

Ce que je pense de cet article ?  Tout simplement que la majorité des Québécois pensent que les vraies Québécoises ne portent pas le hijab. Donc, pas étonnant qu'en le portant, les femmes musulmanes s'exposent de temps à autre à subir des commentaires désobligeants. Contrairement à vous mademoiselle qui ne portez pas le hijab, votre mère et vos soeurs ne seront jamais considérées par l'ensemble des québécois comme étant de vrais Québécoises. Pourquoi ? Le hijab, la burqa et le voile de tout acabit heurtent profondément nos valeurs en tant que Québécois et Québécoises.  Vous avez beau dire que vous le portez sans y être obligées, que vous êtes modernes et éduquées, pour les Québécois, ça ne passe pas.  Point final. On ne vous croit pas.  La vue de ces tissus pour vous voiler donne la chair de poule aux Québécois, c'est viscéral. Ça choque, ça heurte. Ces voiles représentent l'asservissement des femmes aux hommes et à la religion.   C'est comme ça. On a beau faire des débats, éduquer les gens sur les religions, tant qu'il y aura des musulmans intégristes qui tenterons de prendre le pouvoir par la force dans le monde et d'imposer leur religion aux autres, les musulmans modérés aurons à en subir les conséquences. C'est dommage, mais c'est ainsi.

Sylvie Bourque

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Aversion incompréhensible

Je ne comprends vraiment pas cette aversion d'une partie de Québécois envers les communautés arabophones.  Est-ce un fâcheux résultat des événements du 11 septembre?  Me semble que oui. Est-ce qu'on peut m'expliquer quelle différence fait sur la vie de la dame choquée, citée en début d'article, que Mme Demanins porte le hijab? Je n'ai pas encore eu de réponse à ma question. Je ne suis pas sociologue, mais pourquoi ai-je le sentiment que la xénophobie s'est emparée du peuple? Peut-être du "petit peuple", qui ne semble pas avoir évolué malgré 40 ans d'éducation accessible et obligatoire!  Nous ne sommes plus en 1920, au fin fond des campagnes, où il n'y avait que le curé, le médecin et le notaire qui étaient éduqués! L'ignorance est l'ennemi numéro 1 ici, et ce, malgré que nous vivions à l'ère de l'information omniprésente, virtuelle et surabondante, il semble que nous n'ayons pas évolué. Par contre, je suis conscient que le Québec ne détient pas la "pôle" en matière de xénophobie, c'est un courant planétaire...qui devrait nous inquiéter au plus haut point. Imaginez, une société si égoïste qu'elle ne se renouvelle pas (moins d'enfants), qui doit se fier sur l'immigration pour se maintenir à flot (simples notions de démographie ici), et qui n'est même pas capable de respecter ceux qu'elle accueille! Ces gens venus d'ailleurs sont d'une richesse incroyable, nous exposent à autre chose que notre nombril. Ils nous font découvrir pleins de choses, nourriture, musique pour ne citer que deux aspects.  Aberrant de ne pas vouloir en profiter, et surtout, rappellez-vous, que nous sommes ceux qui les avons invités à venir vivre chez nous!

François Beaulieu, Blainville

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Autorité paternelle

Je demeure à Montréal-Nord. Je suis donc habitué à voir des gens d'origines diverses. En apparence, la lettre de Mme Demanins semble bien innocente. Je ne suis pas contre le port du voile, mais je trouve que ce débat prend trop d'ampleur. Je me demande aussi quelle est la vraie liberté de ces femmes ? Nos grands-mères avaient-elles le choix d'obéir à l'Église catholique et d'avoir une famille nombreuse ? D'être soumise à l'homme ? J'ai deux filles et je les ai élevées, ce que j'ai pu faire étant divorcé, pour leur inculquer des principes d'égalité entre les sexes. Ce sujet du port du hijab vient me chercher dans mes entrailles d'homme pro-égalité . Quand je vois en été un homme en shorts, et sa conjointe avec un accoutrement noir de la tête aux pieds, je me dis qu'il n'y a pas de relation d'égalité là-dedans. Quand je vais dans une famille arabo-musulmane et que lorsque le mari est là, c'est à peine si la femme parle et à voix basse, puis quand elle est seule avec moi et un enfant , elle parle fort et de divers sujets, je me pose des questions. Non, le port du voile en soi, je ne suis pas contre . Dans certains cas , c'est sûrement un choix , mais dans d'autres cas, la femme n'a pas le choix . C'est d'avantage une affaire d'autorité paternelle et de culture que de religion.

Pierre C. Tremblay, Montréal-Nord



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Le voile n'a pas sa place

Je ne peux m'empêcher de pencher du côté de la dame qui n'en peut plus de ce voile, intégral ou non. Je n'aurais peut-être pas dit les choses avec ses mots, mais l'idée de base est aussi la mienne, et croyez-moi, je ne suis pas la seule. Au Québec, le voile n'a pas sa place, c'est aussi simple que ça. Vous dites que vous admirez beaucoup votre mère, c'est très bien. Moi aussi j'admire la mienne. Le port du voile n'a rien à voir avec ça. Vous dites qu'elle est au Québec depuis environ 20 ans. Permettez-moi de douter qu'il y a 20 ans, au Québec, elle le portait ce voile. À cette époque, on n'en voyait pour ainsi dire pas. Le port du voile a connu une certaine faveur depuis une dizaine d'années, en fait cela a commencé quelque temps après le 11 septembre et l'augmentation du nombre d'immigrants musulmans. On s'entend pour dire que cette date n'est pas particulièrement un bon souvenir mais c'est à cette date que l'islam est entré dans la vie de beaucoup de Québécois. Nous savons très bien que tous les musulmans ne sont pas des extrémistes. Mais à chaque fois qu'on entend parler des musulmans, c'est pour de mauvaises nouvelles. Entre autres exemples : les sunnites et les chiites qui s'entretuent, l'encouragement au meurtre d'écrivains qui ont osé écrire contre l'islam ou de caricaturistes qui se sont moqués d'Allah, la lutte des talibans pour reprendre le pouvoir et réinstaurer la charia et autres règles pas particulièrement démocratiques ni justes pour les femmes, les attentats par des musulmans qui se font sauter en louant Allah et en espérant une récompense au ciel pour avoir tué le plus de monde possible. Alors, même si on nous assure constamment que l'islam est une religion d'amour, permettez-moi de mettre un bémol et d'être un peu inquiète.

Selon vous, le port du voile n'a pas à nous inquiéter et on ne devrait même pas s'en préoccuper. Vous rendez-vous compte que chaque fois que mon regard croise un voile, je reçois le message, muet mais réel, de «Je suis musulmane» ? Que cette personne le soit me laisse indifférente. Mais puisque vous voulez rendre la chose publique, imaginez que toutes les personnes qui la croisent, de parfaits inconnus, lui disent elles aussi leur croyance religieuse: «Je suis chrétienne», «Je suis athée», «Je suis agnostique», « Je suis bouddhiste»; à la longue, elle en aurait plus qu'assez.

La liberté que vous avez au Québec va avec le respect des valeurs d'ici. Il semble par contre que cette liberté devrait jouer uniquement pour le respect que nous devons avoir envers vous. Quel respect avez-vous pour les gens qui ne sont pas d'accord ? Vous mentionnez, avec un plaisir évident, la réaction de la dame : « Rouge de confusion, elle se dépêche de partir en marmonnant». On sent que vous êtes contente de mettre en valeur une telle réaction.

J'ai eu l'occasion et la chance de voyager dans plusieurs pays. J'ai toujours eu le souci d'ajuster mon comportement aux coutumes ou cultures de ces pays, par respect. Alors, puisque vous vous dites Québécoise jusqu'au bout des doigts, essayez de mieux vous ajuster à la culture québécoise. Ce n'est pas uniquement le fait d'être née ici, d'avoir l'accent, de fêter la St-Jean et d'avoir vécu les durs  hivers qui font ce que nous sommes. Nous sommes un peuple en général tolérant, qui n'aime pas la chicane et qui veut bien accueillir les autres, mais à la condition que ceux-ci veuillent mieux s'intégrer.

Denyse Payette