On ne dit plus «famille d'accueil» depuis belle lurette. On parle plutôt de résidence ou de ressource résidentielle. Or, quand on entend parler d'une résidence privée dans les médias, c'est généralement lors d'un événement fâcheux. L'actualité des derniers jours porte sur des CHSLD qui ne traitent pas bien nos aînés, où ils ne mangeraient ni à leur faim ni une nourriture de qualité. Ce qui est, bien entendu, très inquiétant, voire scandaleux!

Ce qui nous fait réagir et écrire cette lettre, ce sont les propos de M. Pierre-Paul Côté, président de l'Association des retraités de l'éducation et des autres services publics du Québec, qui ont été rapportés dans un quotidien montréalais : «Imaginez, si les services ne sont pas meilleurs dans les établissements gouvernementaux, alors lorsque nous serons rendus aux rapports de visites de résidences privées, ce sera l'enfer !»

Cette réplique nous a fait grincer des dents. Pourquoi démoniser (l'enfer!) les résidences privées? Pourquoi déjà imaginer le pire? Nous ne nous reconnaissons pas là-dedans!

Les personnes qui vivent avec nous deux mangent leurs six à sept portions de fruits et légumes bios tous les jours, du poisson frais trois fois par semaine, de la volaille et de la viande rouge achetés dans un magasin bio, et bien sûr, céréales et produits laitiers tous les jours. Ils mangent exactement ce que nous mangeons tous les deux, assis tous ensemble autour de la table.

Oui, les adultes que nous accueillons dans notre résidence sont des personnes qui, pour la majorité, sont «dépendantes» de nous deux, en ce sens qu'ils ont besoin de notre aide, de notre appui, de notre soutien, de notre affection et de nos compétences. Leur bien-être physique, psychologique et socio-affectif en dépend.

Notre résidence est un lieu d'apprentissages divers où routine et spontanéité se côtoient au quotidien. Notre résidence est un milieu de vie épanouissant qui mise sur l'intelligence, la sensibilité et les forces de tous les adultes qui y vivent. C'est un milieu où vivent des héroïnes et des héros du quotidien, des personnes inspirantes qui sont souvent sources de fierté, de dignité, de joie et de plaisir.

Nous pouvons témoigner pour notre résidence (et pour beaucoup d'autres que nous connaissons) que nous savons être à l'écoute, compatissants, généreux, bienveillants et compétents. Nous travaillons entre 12 à 15 heures par jour, 365 jours par année. Nous sommes responsables en tout temps de notre «clientèle» et nos jours de répit sont extrêmement rares et coûteux. Il n'y a rien de comparable dans le réseau de la santé.

Chaque jour, on se dépasse, on crée, on innove en axant nos services sur les besoins des adultes que nous accueillons. Humanisme, ouverture, générosité, respect, affection et compétence, voilà autant de mots qui caractérisent nos actions dans notre ressource résidentielle.

Nous connaissons personnellement d'autres responsables de résidences qui accueillent soit des personnes aînées, soit des adultes présentant une déficience intellectuelle ou une maladie mentale, et qui sont entièrement dévoués au bien-être de leur «clientèle» tout autant que nous deux.

Oui, nous avons la chance de travailler dans un domaine humainement gratifiant. Cependant, des propos gratuits comme ceux de M. Côté nourrissent inutilement les clichés largement répandus à notre sujet, à savoir que les résidences sont super bien payées à ne rien faire. Or, notre taux horaire est de... 4,63 $ l'heure chacun.