Fumer est un choix personnel, qui relève de la vie privée. Ce qui n'appartient pas au domaine de la vie privée, cependant, est le fait d'imposer aux autres, involontairement, la fumée de tabac secondaire.

Nous voilà dans la « Semaine québécoise pour un avenir sans tabac ». À la radio, à la télévision ou dans les journaux, le message est le même : le tabagisme tue. Mais malgré le battage publicitaire, les Québécois et Canadiens sont aujourd'hui confrontés à une même réalité.

Ces dernières années, de plus en plus de locataires et de propriétaires d'immeubles locatifs ainsi que de propriétaires de condominiums et de syndicats de copropriétés prennent conscience du fait qu'ils subissent de nombreux inconvénients découlant de la présence de fumée de tabac secondaire dans leur domicile. Cependant, très peu d'entre eux choisissent d'agir pour s'attaquer au problème, ce qui explique le nombre restreint de décisions des tribunaux québécois sur cette question.

En décembre 2010, n'eût été un règlement à l'amiable, la Régie du logement aurait eu à se prononcer sur la possibilité, pour un propriétaire de logements, de modifier un bail pour y ajouter une interdiction de fumer du locataire étant donné que la fumée de tabac secondaire se propageait dans l'immeuble et incommodait les locataires.

La décision d'aller de l'avant et d'interdire à des locataires ou à des copropriétaires de condos de fumer a jusqu'ici été contrecarrée par une absence de preuve démontrant un préjudice à la santé des personnes exposées à la fumée secondaire.

Mais la science a évolué plus vite encore que les mentalités. Selon l'Institut national de santé publique du Québec, plusieurs données sont devenues pratiquement incontestables: la fumée de tabac secondaire est plus toxique que la fumée inhalée et rejetée par le fumeur lui-même; la fumée de tabac secondaire contient environ 4000 substances chimiques dont plusieurs cancérogènes; il n'existe aucun seuil minimum sécuritaire d'exposition à la fumée de tabac secondaire; un lien direct a été démontré entre l'exposition à la fumée de tabac secondaire et la prévalence, entre autres, de plusieurs cancers, de problèmes de système respiratoire et cardiovasculaire ainsi que sur le système de reproduction et le développement utérin.

En tant que juriste, je suis d'avis que les tribunaux devront plus tôt que tard reconnaître le préjudice que représente le seul risque de vivre dans un logement adjacent à celui d'un fumeur, lorsqu'il est prouvé que la fumée se propage d'un logement à l'autre et que la personne est préjudiciée par la fumée.

Quelles démarches sont alors disponibles pour les personnes incommodées dans leur domicile? Tenter de régler le problème à l'amiable en discutant et en négociant avec les personnes impliquées (locataire, propriétaire, syndicat de copropriétaires) est certainement l'idéal. Mais si l'on se fie au nombre d'appels reçus où aucun terrain d'entente n'est possible, il ne faut pas entretenir trop d'espoir dans cette démarche.

Reste alors les recours pour les non-fumeurs et leurs propriétaires qui consistent à demander de faire cesser leur exposition à la fumée de tabac secondaire et à ainsi forcer les personnes qui fument de s'abstenir de fumer dans leur logement.

Au Québec, compte tenu du fait que le locateur bénéficie d'un droit au maintien dans le lieu en vertu du Code civil du Québec, il est plus ardu, en cours de bail ou lors de la reconduction du bail, d'ajouter une clause interdisant de fumer aux personnes se trouvant dans le logement. Mais ce n'est pas impossible. Il appartient à ceux qui le désirent vraiment de se lever et de clamer haut et fort ce que plusieurs souhaitent en silence.