La réforme de la régulation financière était au centre des premiers sommets du G20 en 2008-09. Depuis, les progrès ont été inégaux. L'agenda du sommet de Cannes, début novembre, sera dominé par la crise de la zone euro. Mais le monde a plus que jamais besoin d'une régulation financière forte et cohérente. C'est la raison pour laquelle les autorités financières internationales sont si importantes.        

Onze d'entre elles dominent le paysage: le Conseil de stabilité financière (CSF), qui regroupe des organisations nationales et internationales, et les 10 autres organisations mondiales qui en sont membres. Ce sont la Banque des règlements internationaux (BRI) à Bâle et quatre entités hébergées par la BRI; l'International Accounting Standards Board (IASB) à Londres; l'Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) à Madrid; l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) à Paris; et le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, à Washington.

Ces institutions ont toutes été créées au XXe siècle, quand l'Europe et les États-Unis (ainsi que, pour une brève période, le Japon) dominaient la scène financière mondiale. Mais le monde a changé. Les économies émergentes pèsent désormais plus que l'Europe en termes de valeur totale des grandes sociétés cotées. Trois des cinq premières banques du monde par la capitalisation boursière sont chinoises. Hong-Kong et Singapour rejoignent Londres et New York au sommet des classements de places financières. La crise a accéléré ce déplacement, car l'Occident entre dans un long cycle de désendettement et de croissance molle face à des économies émergentes qui restent très dynamiques.

Les autorités internationales ne se sont pas encore adaptées à cette nouvelle réalité. Certes, la plupart d'entre elles ont élargi leur composition à la Chine, à l'Inde et à quelques autres. Mais une seule est dirigée par un représentant du monde émergent, le Mexicain Angel Gurria à l'OCDE. Parmi les sept qui sont dotées d'un président non exécutif, seule l'OICV a récemment promu un non-Occidental à ce poste. Toutes sont basées en Europe ou aux États-Unis, ce qui rend difficile la participation des non-Occidentaux aux réunions.

La succession de Dominique Strauss-Kahn au FMI a montré que les pays émergents restent réticents à prendre l'initiative pour forcer un réajustement. Mais ils ont le temps de leur côté. Dans ce contexte, l'intérêt bien compris des Occidentaux est de renoncer unilatéralement à certaines de leurs prébendes. Mais cela nécessite un changement complet d'attitude, en particulier pour les Européens, qui sont plus surreprésentés dans ce système que les Américains et qui ont le plus grand mal à accepter leur nouvelle position, beaucoup moins centrale qu'auparavant, dans le jeu planétaire.

Parmi les changements concrets qui pourraient être envisagés figurent le déménagement en Asie, sans grande difficulté logistique, des secrétariats de certains des comités bâlois. Un objectif plus ambitieux serait la délocalisation du siège de la Banque mondiale ou du FMI hors des États-Unis. Par ailleurs, pendant une période de transition, les candidats non occidentaux devraient avoir la priorité lors de changements à la tête des autorités financières mondiales. Les prochaines nominations-clés, notamment à la Banque mondiale en 2012, devraient être réservées à des non-Occidentaux.

Même dans cette hypothèse, l'émergence d'une régulation financière mondiale forte et efficace n'est en rien acquise. Mais sans rééquilibrage, les autorités financières internationales sont condamnées à sombrer peu à peu dans l'insignifiance. Tout le monde y perdrait.