Ayant passé les dernières semaines en Europe, ma forte impression est que la crise actuelle ne se soldera pas par une Europe plus unifiée en ouvrant la porte à la création d'un futur ministère européen des Finances, qui émettrait des obligations «européennes» et coordonnerait ses interventions avec la Banque centrale européenne.

Les gouvernements européens vont plutôt avoir recours à un assortiment de mesures d'urgence temporaires et de court terme et vont se débrouiller d'une manière ou d'une autre pendant un certain temps. Ensuite, avec l'arrivée d'une crise encore plus importante, la conception actuelle de l'Union européenne s'effondrera.

Ce qui semble manquer totalement en Europe à l'heure actuelle est un objectif à atteindre. Aucun politicien européen n'a articulé une vision d'un modèle de société prospère et efficace.

Ce qui m'a d'abord frappé en Europe est la présence constante de jérémiades et la conviction que l'État doit régler tous les problèmes. Et cela, en dépit du fait que les coffres des gouvernements sont vides et leur accès au crédit limité.

Bien sûr, nous avons aussi beaucoup de jérémiades de ce côté de l'Atlantique. Cependant, la différence ici est qu'il y a un sentiment d'espoir et de but à atteindre qui est difficile à détecter en Europe. Google, Apple, Facebook, Yahoo! et Amazon, le dynamisme entrepreneurial qu'ils représentent, l'accès aux capitaux pour croître, trouver des solutions à des problèmes difficiles, sont des symboles de cette différence.

En France, en revanche, le débat bla-bla de l'heure est sur la «dé-mondialisation» et sur Martine Aubry, une des candidates sérieuses pour la nomination du Parti socialiste à la course à la présidence et l'architecte de la loi sur la semaine de travail de 35 heures.

Moïse avait sauvé les Juifs de l'esclavage égyptien et leur avait proposé l'option de la liberté et de la responsabilité. Une tâche difficile. D'abord, il a erré pendant 40 ans dans le désert pour se débarrasser de la génération élevée dans la mentalité de l'esclavage. Puis il s'est retrouvé avec une nouvelle génération qui n'avait plus la mentalité d'esclave, mais avait perdu l'éthique du travail après avoir reçu la manne du ciel pendant 40 ans.

Résultat: il n'y a pas de repas gratuit dans ce monde, même si physiquement la manne semblait l'être. La mentalité d'esclave a été perdue, mais la paresse et la tendance à pleurnicher l'ont remplacée.

La situation des Européens de l'Ouest a été très bonne jusqu'à il y a 20 ans. Le capital, aussi bien financier qu'humain, s'échappait du reste du monde pour se réfugier chez eux, aux États-Unis, au Canada et en Australie. Cela a permis à tous, même les plus paresseux et les moins qualifiés, de se faire payer bien plus que leurs efforts et leurs compétences ne le méritaient parce qu'ils avaient des pouvoirs accrus de négociation face à ceux qui étaient qualifiés et ambitieux, qui n'avaient pas d'autres endroits où aller. Cette situation était pour eux la «manne».

Et, avec les menaces communistes et les souvenirs de la Seconde Guerre mondiale à leur porte, les Européens de l'Ouest ont gardé un certain sens de l'objectif à atteindre. Ce sont les parallèles des souvenirs de l'esclavage.

Et puis, tout cela a disparu. Plus de libertés sont venues, mais dans quel but? Il aurait fallu montrer à la nouvelle génération que la notion insaisissable de la liberté nationale était compatible avec une perspective individuelle et la réussite. Vous devez avoir l'esprit d'entreprise et vous devez exécuter votre plan.

Les Européens, à qui de bien plus grandes libertés ont été données durant les 20 dernières années, n'ont pas utilisé ces dons à bon escient. Leur vie a été trop facile.