Étudiant à la maîtrise en philosophie à l'Université de Montréal, l'auteur réagit à l'opinion «Un freak show» publiée mercredi.

On ne peut que se sentir déprimé et découragé qu'après des années de luttes pour le droit à la différence, le défilé de la fierté gaie soit jugé si déplacé et ses objectifs si mal compris par la population en général, mais aussi par plusieurs membres de la communauté gaie.

M. Michaël Turcotte-Talbot déplore que le défilé soit devenu un freak show, qui valoriserait les trans et les hommes féminins, au lieu de servir à des revendications politiques légitimes comme la lutte contre l'homophobie. Or le défilé peut encore servir à ces fins.

D'abord, les premières revendications politiques faites au nom de la communauté gaie le furent souvent par des drags et des trans, ces mêmes «freaks» qui font partie du défilé.

Ensuite, le défilé est festif et joue avec les préjugés sur la communauté gaie pour une raison simple et légitime: la lutte contre l'homophobie. Cette lutte ne se limite pas seulement à réclamer le droit de coucher avec qui l'on veut, mais aussi à réclamer le droit à la différence, à affirmer qu'il y a autant de manières légitimes d'être homme qu'il y a d'hommes, d'être femme qu'il y a de femmes.

En jouant sur les préjugés largement répandus sur la communauté gaie, le défilé cherche à ouvrir les normes, à faire imploser les préjugés en se les appropriant. Il ne promeut pas de style de vie particulier, il réclame que chacun, peu importe son sexe, son orientation sexuelle, son genre ou ses organes génitaux, puisse être ce qu'il ou elle souhaite, et aimer qui il ou elle veut à sa manière propre.

Que la majorité des homosexuels ou de la population ne se sentent pas d'affinité avec l'image projetée par le défilé est peut-être vrai, mais c'est que cette image est volontairement subversive. Le défilé n'est pas là pour dire à la population «regardez-nous, nous sommes comme vous, respectez-nous», mais bien pour affirmer que le respect et la reconnaissance ne nécessitent pas d'être identique. On peut être différents et égaux.

Vive le freak show!