Dans la foulée de la crise touchant l'industrie de la construction, diverses allégations ont été faites concernant le secteur du génie-conseil, dont plusieurs semblent découler d'une méconnaissance du rôle de l'ingénieur-conseil auprès de ses clients, publics ou privés.

Il faut prendre garde de tracer le portrait d'une industrie qui ne poursuivrait que son intérêt commercial au détriment de l'intérêt du client. Au contraire, le succès d'une entreprise de génie-conseil se bâtit avant tout sur la confiance et le constat, chez le client, que la firme apporte une valeur ajoutée. Aucune relation d'affaires n'est durable sans cette confiance renouvelée projet après projet.

 

L'image de «l'envahissement» du génie-conseil chez les clients publics apparaît fort exagérée. L'augmentation du niveau d'activité en génie-conseil ces dernières années ne devrait pas surprendre. L'ampleur des projets publics est sans précédent et les firmes de génie-conseil ont été les premières à être sollicitées pour répondre à la pointe actuelle, puisque les études préliminaires et les plans et devis précèdent les travaux de construction.

Par ailleurs, l'image de la «déperdition» de l'expertise du secteur public est aussi excessive. Les statistiques de l'Ordre des ingénieurs du Québec démontrent plutôt que le nombre d'ingénieurs à l'emploi des administrations municipales ou régionales a progressé de 36% sur cinq ans.

Par le passé, la planification insuffisante de certains projets publics a été fortement critiquée. Ironiquement, les critiques surgissent à nouveau lorsque des administrations publiques tentent d'améliorer la qualité du travail à cette étape cruciale, qui ne représente qu'environ 1% du coût total d'un projet sur son cycle de vie et qui permet d'optimiser tous les autres coûts. Profiter de l'expertise des ingénieurs-conseils à cette étape, comme le fait avec succès le secteur privé, apparaît tout à fait sensé.

De plus, les firmes québécoises d'ingénieurs-conseils ont démontré leur capacité à créer de l'emploi, à importer des compétences et des techniques acquises ailleurs et à exporter leur expertise sur les marchés canadiens et internationaux, ce qui est un apport positif pour le Québec. Les firmes québécoises réalisent 50% des exportations de services d'ingénierie au Canada, le quatrième pays exportateur au monde dans ce domaine. Certaines firmes québécoises figurent d'ailleurs parmi les plus importantes et les plus respectées sur la planète.

La participation d'un nombre parfois limité de firmes à des appels d'offres dans certaines municipalités ou régions a aussi été soulevée. Or, la proximité physique et la connaissance plus poussée du milieu confèrent souvent aux firmes locales des avantages économiques et techniques. Il est donc normal de voir ces firmes remporter plus souvent ces appels d'offres. En outre, certaines municipalités ou régions utilisent des critères de sélection pour encourager l'emploi dans leur région, ce qui peut être légitime si la qualité des services n'est pas affectée.

Également, dans un contexte de mondialisation, le secteur du génie-conseil, comme d'autres secteurs, a connu une importante consolidation. Aujourd'hui, l'Association des ingénieurs-conseils du Québec (AICQ) regroupe une cinquantaine de firmes représentant 95% de la main-d'oeuvre du secteur, où les 10 plus importantes créent 80% des emplois. Il est évident que leurs noms reviennent plus souvent.

Enfin, l'apparition de modes de réalisation non traditionnels dans le secteur public, par exemple les PPP, peut donner lieu à des situations d'apparence de conflits d'intérêts, auxquelles les firmes doivent s'adapter, comme l'ont fait les comptables ou les avocats. L'AICQ a amorcé une réflexion afin que l'industrie se donne des lignes directrices sur ces questions, conformément aux standards internationaux.