On n'avale plus n'importe quoi. On vérifie les étiquettes: pas de gras trans, pas trop de sel, de sucre, de colorant artificiel... De plus, on recherche les meilleurs apports caloriques, nutritifs. Bref, on surveille de près l'alimentation de nos enfants pour favoriser une meilleure croissance. On cherche à manger santé pour notre bien-être physique. Bien. Très bien tout ça.

Il serait peut-être bon maintenant de faire la même chose pour le bien-être de notre esprit et surtout celui, en développement, de nos enfants. La malbouffe intellectuelle sévit actuellement. Ce ne sont, bien souvent, que des calories vides dans les divertissements, l'information, l'enseignement. On se bourre de sucre, de sel, et de gras parce que c'est facile et ça goûte bon. Mais il nous faut aussi de la viande, des protéines, du fer, des vitamines.

 

C'est bien l'humour partout: à la radio, le matin, au bureau via les clips internet, le soir à la télé ou au spectacle d'un des innombrables humoristes, mais ça fait beaucoup de sucre dans une journée. À peu près que du sucre. Pas beaucoup de viande là-dedans.

Dans les informations - surtout les chaînes qui en présentent en continu -, alors là, c'est du sel. Beaucoup, beaucoup trop de sel. On aime ça, c'est plus goûteux, on en rajoute toujours un peu, ça nous fait faire des hon! des woo!, des «ça s'peux-tu!» Ça excite, ça donne soif, mais ça ne nourrit pas. Tout juste hors-d'oeuvre bons à couper l'appétit.

On en recherche toujours et on s'en fait offrir partout: les téléréalités, les émissions trash, les ramassis de vidéos spectaculaires d'accidents, de catastrophes, d'incidents disgracieux. Ça fait beaucoup de sel tout ça dans une journée. Pas bon pour le coeur; ça durcit les artères.

Et mêlé à tout ça, mêlant tout ça, le gras trans épais et omniprésent qu'est la publicité développée et présentée sous la forme du plus petit dénominateur commun. Publicité envahissante, débordante et dégoulinante par-dessus tout ce sel et tout ce sucre. Du bon gros gras trans épais. Rien de bon pour la santé de l'esprit, en plus de procurer de sérieuses crampes à l'humeur quotidienne.

Oui, je sais, on peut bien se retirer à la campagne, sans journaux, sans télé ou internet, mais, comme dans les régimes, un jeûne sévère n'est jamais recommandé. Quand on en revient, on en consomme encore plus en réaction à la carence. On n'y échappera pas sans modifier nos habitudes et notre mode de consommation.

Tous les jours, les philosophes diététiciens vous le diront, il nous faut notre part des principaux éléments: un peu de réflexion, de solitude, d'apprentissage, de lecture, de recherche. Il faut se mettre au contact d'un art et d'une culture substantielle. Sans quoi on perd nos dents d'analyse critique. Nos muscles de réflexion s'atrophient, notre système d'imagination s'affaiblit. On ne digère plus bien les carences, les frustrations et on finit par développer une cirrhose du cerveau. Bon.

Comprenons-nous bien: je n'ai absolument rien contre les sucreries, les croustilles et autres cochonneries - c'est un junkie qui vous parle -, seulement, il ne faut pas que ça devienne tout notre régime alimentaire. Bon. Ce que je dis c'est que je souhaite aussi, un jour, un étiquetage sur tous ces produits de consommation nous avisant avant chaque émission, chaque article de journal, chaque spectacle, des valeurs nutritives contenues: stupide... 27%, insipide... 67%, névrose... 15%, contamine... 22%, protéine intellectuelle... 4%, calories... 1%. Peut contenir des traces d'intelligence.

Je souhaite un étiquetage, mais surtout une pareille attention de notre part sur tout ça comme sur notre consommation alimentaire. L'esprit, comme le corps, doit être quotidiennement nourri des parts essentielles et équilibrées d'éléments nutritifs. Sinon, ça nous fait une société obèse d'insignifiances et de superficialités.