Enceinte de 20 semaines, j'avais pris la décision de ne pas me faire vacciner. Personne ne pouvait m'assurer que le vaccin Arepanrix est totalement sans risque pour moi ou ma future fillette. Personne, pas même mon médecin, ne pouvait m'assurer qu'on ne découvrirait pas les effets secondaires néfastes de ce vaccin dans un, trois, cinq ou dix ans.

Prenant déjà des super vitamines pour femmes enceintes depuis des mois, je suis retournée à l'épicerie faire provision d'une tonne de fruits, de légumes, et de petits pots de yogourts probiotiques, question de gonfler à bloc mon système immunitaire.

 

Armée de tous ces soldats anti-grippe et anti-rhume, je planifiais d'attendre que la tempête passe, loin de la paranoïa, les mains écorchées par l'alcool de mes nombreuses applications de Purell.

C'était avant que le spectre de la grippe n'envahisse mon quotidien.

Du jour au lendemain, je n'avais plus le droit de me lécher les doigts après avoir mangé une pâtisserie, sous peine de mettre la vie de mon foetus en danger.

Hyper conscientisé par les reportages continuels dans les médias, mon entourage s'est mis à s'enquérir de ma santé quotidiennement, s'inquiétant soudainement d'un petit toussotement, de mon nez qui coule (comme chaque automne), du moindre signe de fatigue.

Mon conjoint, pris d'un simple mal de tête, m'a interdit de l'embrasser. «On ne sait pas: c'est peut-être la grippe!» disait-il. Lui-même s'examinait constamment, à l'affût du moindre signe de cette grippe qu'il pourrait me transmettre, et ainsi, peut-être, mettre la vie de notre bébé «en danger».

Après quatre semaines de ce régime de terreur, j'en ai eu assez que la grippe, que je n'avais même pas, envahisse autant mon quotidien. Le fruit était déjà «mûr» lorsque l'obstétricien qui effectue mon suivi de grossesse m'a fait comprendre on ne peut plus clairement que je devrais courir me faire vacciner, en me disant «qu'une maman morte ne pouvait pas s'occuper de son bébé». D'après lui, les risques d'avoir une réaction allergique au vaccin lui-même sont négligeables comparativement aux risques liés à la grippe A (H1N1). Et les risques liés à l'adjuvant? Des histoires, selon lui. Je suis sortie de son bureau avec la culpabilité d'une femme qui met son foetus en danger. Encore! J'ai compris, à ce moment-là, que je devais choisir le moindre mal et me faire vacciner.

Mon entourage a été immédiatement soulagé par ma décision. Enfin, ils n'auraient plus à s'inquiéter pour moi! Fini, les appels inquiets et les mises en garde constantes! J'aurais moi aussi la paix, d'une certaine manière.

Mais encore fallait-il que je m'attaque aux files d'attente des centres de vaccination! Pas question de passer des heures dehors à cinq mois et demi de grossesse! Je me suis présentée mardi soir à 18h40 au centre de vaccination de mon secteur, soit l'école Samuel-de-Champlain à Longueuil, ouvert de midi à 20h. J'étais presque certaine qu'à cette heure, on me retournerait chez moi, faute de pouvoir me vacciner avant la fermeture en raison de l'achalandage. À ma grande surprise, on m'a non seulement admise, mais je suis ressortie 45 minutes plus tard avec ma boule d'ouate scotchée sur le haut du bras gauche! J'étais de retour chez moi à 19h45, vaccinée avec adjuvant.

Seul hic, le centre n'avait pas de vaccin sans adjuvant. Oui, ça m'inquiète, mais je vais vivre avec, et faire confiance au Collège des médecins. Dans quatre semaines, c'est-à-dire lorsque le vaccin fera son effet, je pourrai enfin passer à autre chose... et ne plus paniquer quand j'oublie de ne pas me lécher les doigts après avoir englouti une chocolatine, l'un des plaisirs simples de ma vie de femme enceinte.