Depuis une semaine que je suis revenu d'Europe où je voyage avec notre spectacle Cavalia, je constate que la culture est au milieu des enjeux électoraux fédéraux au Québec. En tant que créateur et entrepreneur du milieu culturel, je me permets d'intervenir dans le débat pour y apporter un son de cloche diamétralement opposé à tout ce que je lis depuis quelques jours. Je pense que l'abolition des programmes par le gouvernement fédéral est une excellente idée!

Comprenez-moi bien: je ne m'oppose pas du tout à ce que l'on réclame plus d'argent pour les artistes et artisans de la culture, bien au contraire; mais, je crois que la majorité des programmes visés par les compressions sont désuets, difficiles d'accès, compliqués à administrer et mal adaptés à la réalité de la culture d'aujourd'hui, surtout pour les artistes, artisans et créateurs qui sont nouveaux, inventifs, actuels et modernes.

 

Parmi tous ceux qui semblent, à l'unisson, décrier l'abolition de ces programmes, je me demande combien d'entre eux savent vraiment de quoi ils parlent? S'ils connaissaient même l'existence de ces programmes avant que leur abolition soit annoncée? Ont-ils lu la liste de ces programmes? Ont-ils essayé de déposer des demandes récemment?

Personnellement, à l'exception du programme Routes commerciales, je n'avais jamais entendu parler de ces fameux programmes qui viennent d'être coupés. Notre compagnie, Cavalia, emploie 150 personnes en tournée, elle voyage partout sur la planète sans subvention. Cette année, nous avons entrepris plusieurs démarches pour trouver de l'aide des gouvernements. Entre autres, nous avons sollicité le programme Routes commerciales et nous avons obtenu une subvention de 16 000$. Après avoir pris connaissance des conditions administratives reliées à ce programme, nous avons décidé de ne pas toucher à cet argent. Il nous en coûtait aussi cher de répondre à tous les critères imposés par ce programme que le revenu de la subvention elle-même.

Ce que j'aimerais dire aussi, c'est que dans le dédale de subventions offertes par les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux (la liste pourrait remplir à elle seule le bottin téléphonique de la ville de Laval), entre les différents gouvernements fédéral, provincial, municipal, entre les différents intervenants, ministres, conseils, ministères, organismes, lobbyistes, partis politiques, institutions, comptables, administrateurs, avocats, spécialistes de toutes sortes, etc., il y a beaucoup de monde qui gère et s'ingère dans ces programmes. Avec tous ces gestionnaires et les centaines de programmes qui existent, il y a de quoi se poser une question Combien de tout cet argent va vraiment aux créateurs, aux artistes et aux entreprises culturelles? ()

J'encourage donc nos dirigeants gouvernementaux à couper les programmes actuels et à revoir l'ensemble des programmes qui s'adressent à notre merveilleux monde culturel, tant à Montréal, à Québec qu'à Ottawa. Mais, attention, une révision en profondeur s'impose! Il nous faut des fonds mieux adaptés à notre réalité d'aujourd'hui. À nous, au Canada et surtout au Québec, d'être créatifs et uniques dans la façon de gérer cet argent! Nos gouvernements, qu'ils soient bleu, rouge, bleu pâle ou vert, doivent revoir comment aider les artistes!

Pourquoi les artistes, artisans et organismes oeuvrant dans le monde culturel ne seraient-ils pas tout simplement exemptés d'impôts? Pourquoi les gouvernements n'aboliraient-ils pas la TPS et la TVQ sur le prix des oeuvres et des billets produits par des artistes et artisans d'ici? Pourquoi le secteur privé ne pourrait-il pas obtenir des crédits d'impôt pour sa participation à un projet culturel? Ces idées sont utopiques! Je suis rêveur! C'est impossible, allez-vous me dire? Bien! C'est ce que j'ai entendu sur presque tous les projets que j'ai réalisés dans ma vie d'entrepreneur en culture. Et pourtant, à force de chercher, de travailler, de bûcher, d'être inventif, ça finit par marcher! Ce n'est pas facile, pas évident, mais l'innovation, ça marche! ()

À vos tables à dessin, il faut créer! Même dans le monde du financement public!

L'auteur est directeur artistique de Cavalia.