Des enseignants et des pédiatres ont lancé une coalition qui s'oppose à l'intégration à tout prix des élèves en difficulté, de plus en plus nombreux dans les classes régulières. Selon la coalition, l'intégration à tout prix ralentit la progression des élèves «ordinaires», nuit aux enfants en difficultés qui ne peuvent pas suivre et épuise les professeurs qui manquent de formation pour composer avec les besoins particuliers de ces derniers. Qu'en pensez-vous?

MERCI DE NOUS AVOIR FAIT PARVENIR VOS COMMENTAIRES

Pourquoi sont-ils si nombreux?



Chaque fois que j'entends parler du problème que représente le nombre grandissant d'élèves en difficulté, je me pose les question suivantes: pourquoi sont-ils si nombreux? Pourquoi leur nombre augmente t-il? Si on trouvait la réponse à ces questions, peut-être pourrions-nous trouver une solution à ce problème.



Jean Boutin, Québec

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Fragile équilibre bouleversé



J'enseigne au primaire depuis 18 ans. J'adore mon travail. C'est le plus beau métier du monde. Nous formons et influençons un jeune esprit d'innombrables façons et ce, pour toujours. Tous les métiers du monde passent par nous! L'intégration à tout prix a totalement bouleversé ce fragile équilibre. Car maintenant, au lieu d'aider et de guider, nous avons été réduit à traîner et tirer, à faire ce qu'on peut. Trop d'enfants en difficulté dans une classe entraînent inévitablement la majorité vers le bas. Nous, les profs, devons tirer 29 enfants vert le haut, à tous les jours. Nous n'avons pas de ceinture de sauvetage (lire: services et conditions de travail), nous devons nous débrouiller seuls. Les fonctionnaires et malheureusement certains parents, qui refusent que leur enfant ayant de grandes difficultés soit placé dans un groupe dit «spécial» où les services sont présents, ne réalisent pas le coût humain de cette intégration. Tant chez les enfants que chez les enseignants, maintenant et dans les années à venir. Lors de la journée pédagogique du 31 janvier dernier, à la Commission scolaire Marie-Victorin, où il fut question de parler de décrochage scolaire, certains enseignants relataient leur vécu en sanglots. Moi-même, j'avais des trémolos dans la gorge. Nous sommes fatigués et vidés. Heureusement, l'année en cours est moins éprouvante. Ou peut-être me suis-je formée une carapace? Je ne sais pas. Le sentiment du travail bien accompli, connaissez-vous? Seriez-vous capable de vivre avec le sentiment que vous auriez pu faire plus, et ce, à tous les jours?



Nathalie De Serre, enseignante



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N'exagérons pas les bénéfices de l'intégration



Il est vrai que la formation est minimale quant aux troubles d'apprentissage et de comportement, mais nous en avons. Là ne réside pas le problème; même avec la meilleure formation du monde et la plus grande des volontés, c'est le temps qui manque! Lorsque 4-5 élèves sont intégrés dans une classe de 33 élèves («réguliers» et/ou simplement non cotés), il devient extrêmement difficile, voire impossible, de faire tout ce qui ferait réellement du bien à ces jeunes-là. Et si on s'y attarde trop, c'est 28 élèves qui n'ont pas ce qu'ils mériteraient eux aussi. VINGT-HUIT élèves parmi lesquels il y a des très doués qui ne veulent qu'aller toujours plus loin; des «moyens» pour qui ce que nous faisons comme enseignant fait la différence entre avancer plus loin ou se blaser et se fermer à l'apprentissage; des faibles que l'on peut perdre à tout moment. Pour quelle raison valable intègre-t-on à tout prix? Pour que ces jeunes-là aient une meilleure estime d'eux-mêmes? Se sentent «normaux»? Pour que leurs parents aient l'impression d'avoir un enfant «normal»? J'aime ces élèves cotés HDAA autant que les autres, ils méritent qu'on lLs serve eux aussi. Mais n'exagérons pas les bénéfices de l'intégration aux dépens d'un bon suivi en classe spécialisée. Cela aide rarement la scolarisation du jeune... Et si pour sauver l'ego d'un enfant, il faut nuire à une vingtaine d'autres élèves, je doute que ça en vaille la peine.  



Karine St-Onge, enseignante au secondaire



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Tout le monde n'est pas fait pour les études



Je suis une grand-maman qui a vécu plusieurs systèmes scolaires dans des langues différentes. Ma mère, ma tante, ma grand-mère et mes arrière-grands-pères étaient enseignants au primaire en Suisse. Ce que j'ai pu constater, c'est que l'intégration à tout prix nuit

grandement aux élèves en difficulté (stress), aux cérébraux (ils s'ennuient en classe et ne sont pas stimulés à leur plein potentiel), mais surtout, cela épuise les profs! Pour avoir accompagné mes quatre enfants dans leur scolarité (j'étais maman à la maison, Dieu merci!) j'en suis venue à une conclusion très simple: tout le monde n'est pas fait pour les études! Tous ne sont pas destinés à aller à l'université !Il y aura toujours des jeunes «scolaires» et d'autres plus versés dans  le pratique. (J'utilise intentionnellement cet énoncé plutôt que «bon ou mauvais élève») Il faut valoriser les métiers plus modestes, mais oh combien utiles! Quand est-ce que l'on reconnaîtra enfin cela? Quand est-ce que l'on va proposer une formation technique progressive sur le terrain (avec par exemple des cours de technologie un jour par semaine dans des écoles professionnelles?) comme cela se fait ailleurs en Europe? À mon avis, le système d'études québécois est inapproprié pour les spécificités humaines. On voudrait que tout le monde soit pareil, bénéficie des mêmes chances! Mais on n'est pas faits pour être égaux... il y a des garçons et des

filles, c'est déjà toute une distinction! Arrêtez de chercher à aplanir les différences! Ça ira tout de suite mieux quand on laissera les jeunes vivre leurs particularités, plutôt que de valoriser la réussite scolaire. Puis il sera temps de rétablir le respect, le dépassement de soi et le sens des responsabilités...



Sylvette Muller, Bécancour



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Bonne intention, piètres résultats


Une aberration de fonctionnaires, de tous ces spécialistes du développement des enfants pensé dans l tour d'ivoire qu'est le ministère de l'Éducation. L'intégration pour tous ne convient ni aux élèves en difficultés ni aux élèves des classes ordinaires. L'intention est bonne mais les résultats ne sont pas au rendez-vous, même si on obtient de bons résultats de temps en temps. Lorsqu'on regarde de près ces bons résultats on constate presque toujours des projets qui on été pensé par des enseignants au niveau d'une école spécifique avec l'accord de leur direction, Si on a réellement à coeur et comme objectif principal le bien des élèves en difficulté qu'on réponde à ses propres besoins. Actuellement, l'intégration pour tous à tout prix  sert uniquement à essayer de justifier les décisions d'un ministère de l'Éducation déconnecté du milieu scolaire de base qu'est l'école. Et s.v.p., que le ministère, qui semble toujours se préoccuper d'avantage de son image que du bien des élèves, laisse les écoles agir en leur donnant  toutes les ressources dont elles ont besoin.



Pierre Mercier

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À chacun ses capacités

En réponse à votre question, je vous soumets un parallèle. Prenez n'importe quelle activité, jouer au tennis par exemple. Si vous mettez ensemble un joueur très fort avec un autre pas du tout doué, non seulement le pas doué ne va rien apprendre du plus fort, mais il va se démotiver et abandonner assez vite, le temps que son adversaire périsse d'ennui à force d'espérer que la partie finisse. On cherche la raison du décrochage scolaire? Elle est là. Les faibles se sentent invariablement comme d'éternelles cruches et les plus forts ont la sensation de perdre leur temps. À quoi bon continuer dans ce cas? L'ancien système qui regroupait les étudiants selon leurs capacités -qui ne se souvient pas des cours classique, scientifique et général -, était bien meilleur. Celui qui avait de grandes capacités pouvait avancer plus vite et celui qui en avait moins et pouvait se valoriser dans des activités selon ses talents et en ressentir de la fierté. Il faudra bien que le ministère de l'Éducation s'entre dans le coco une bonne fois pour toutes que ce n'est pas tout le monde qui a envie d'être informaticien ou ingénieur ou qui en a les capacités, et qu'un fichu de bon plombier gagne plus qu'honorablement sa vie: il faudrait donc redonner aux cours de métiers leurs lettres de noblesse. À chacun ses talents, à chacun ses capacités. Encourageons tous les «plus» que chaque enfant peut apporter chacun à sa manière au lieu de forcer tout ce beau monde disparate à entrer dans le même moule avec les résultats désastreux que le ministère récolte chaque année. Nous n'avons pas les moyens de sacrifier une autre génération. Il ne faudrait pas oublier qu'Einstein pour ne nommer que celui-là, passait pour un crétin fini auprès de ses maîtres. Il a appris autrement. Combien de grands artistes ont été des cancres à l'école? Mais aussi combien de grands cerveaux ont reçu la stimulation nécessaire à leur croissance intellectuelle? Quand un prof passe le plus clair de son temps à faire de la gestion de classe, c'est affligeant. À force de tout vouloir égaliser par souci de ne pas faire de pé-peine à qui que ce soit, nous sommes en train de saboter notre jeunesse. Dommage!

Dominique Lavoie

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Défavorisés

Mon expérience, depuis six ans, à titre de bénévole dans une école pour jeunes en difficulté m'a enseigné que ces jeunes sont très défavorisés en les laissant dans une classe régulière, au niveau secondaire à tout le moins. Les parents qui insistent pour garder leurs enfants parmi les autres ne réalisent pas à point ils leur rendent la tâche plus difficile.

Fernand Lavigne

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Désabusés et en colère

Nous sommes épuisés de nous battre contre le système scolaire québécois. Nous avons un fils de 12 ans qui fera son entrée au secondaire l'an prochain. Il est allé passer ses examens d'entrée pour le programme international de l'école secondaire qu'il fréquentera. On lui refuse l'accès à ce programme parce qu'il est autiste de haut niveau (avec une douance supérieure au point de vue académique) et parce qu'il a un problème avec l'autonomie. Pendant toutes ses années au primaire, nous avons vécu avec la fermeture des profs face à son intégration même si nous leur apportions tout notre soutien et l'aide de sa psychologue qui le suit depuis qu'il a l'âge de 2 ans et demi. Nous n'avons jamais demandé à l'école de «régler» tous les problèmes de notre fils et nous imaginions, bien naïvement qu'il était possible de travailler en collaboration étroite avec le milieu scolaire. Quelle déception avons-nous eu de nous rendre compte que cela n'était pas possible: profs réfractaires à l'intégration de notre fils différent mais qui a la capacité de suivre un cours régulier, peu de moyens qui sont souvent inadéquats pour aider ce dernier, jugement sévère face à la contribution que nous voulions apporter à sa scolarisation. Aujourd'hui, après avoir perdu un temps précieux dans le développement de notre enfant afin qu'il acquiert son autonomie, on nous dit que l'an prochain, il n'aura probablement pas d'accompagnement puisque les budgets pour de tels services ne sont pas au rendez-vous... Alors, d'un côté, l'école nous dit que notre fils n'a pas les aptitudes sociales nécessaires pour entrer dans un programme particulier et de l'autre, elle nous dit qu'elle ne fera rien pour essayer de l'aider à régler cette situation... Nous voici donc désabusés, fatigués et en colère face à un système qui ne sait pas prendre soin de notre enfant différent. Entreprendre une démarche juridique nous demanderait beaucoup de temps et d'énergie, mais nous sommes à nous demander si nous en avons encore la force bien que notre fils mériterait amplement d'avoir des parents qui soient prêts à se battre pour lui. Un tel combat, nous dit notre entourage, en est un de David contre Goliath, alors nous sommes encore en réflexion afin de prendre la meilleure décision pour son avenir.

Chantal Boulais et Réal Paquette, fiers parents d'un enfant différent

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Avec l'aide d'une orthophoniste

J'ai été placé lorsque j'étais jeune dans une classe régulière pendant que je souffrais de dyslexie. À ma première année au primaire, j'ai échoué aux deux premiers bulletins, j'ai donc dû aller voir une orthophoniste puisque ma professeure n'avait pas les moyens ni les ressources pour m'aider. Si mes parents n'avaient pas pu payer pour de l'aide, j'aurais probablement encore beaucoup de problèmes. Beaucoup de jeunes de mon âge, dans la vingtaine, avaient le même type de problèmes que moi et ont décroché de l'école. Je crois qu'il est donc important d'agir pour les élèves qui ont des problèmes, peu importe ces problèmes.

Renaud Gervais

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Un boulet traîné depuis le primaire



Je suis enseignante dans un centre d'éducation des adultes où l'on remarque, depuis quelques années, une nette augmentation des jeunes de 16 à 18 ans dans nos classes. C'est un phénomène que nous pouvons expliquer en partie et, malheureusement, parmi les raisons qui amènent ces jeunes sur nos bancs d'école, trônent l'aspect de la facilité et le rythme individuel qui parfois se traduit carrément par l'inaction. Mais au-delà de ces raisons et en discutant avec plusieurs élèves, il y a une constante qui ressort. La plupart des élèves qui aboutissent dans nos centres n'en sont pas à leurs premières difficultés. Ils traînent souvent un boulet depuis les classes du primaire. Parfois, leurs problèmes d'apprentissage (dyslexie, dysphasie, troubles du comportement, etc.) n'ont jamais été détectés. Pour d'autres, des troubles ont bel et bien été diagnostiqués, mais l'enfant n'a jamais accepté d'être étiqueté. On tombe alors dans un autre ordre de problème. Ce qui ressort des discussions avec les élèves du centre, c'est qu'ils se sentent à l'aise dans un milieu où on ne les catalogue plus puisque tous ont des cheminements particuliers. Un sentiment d'appartenance s'y développe et l'élève est plus à l'aise de consulter, sur une base volontaire et selon les conseils de ses enseignants,  les différents professionnels mis à son service (intervenants sociaux, psychothérapeutes, orthopédagogues, aide pédagogique individuelle, etc.). Lorsqu'on fait face à des élèves en difficultés, il faut donc mesurer rapidement et régulièrement les conséquences de l'intégration ou de l'exclusion de ces enfants souffrant de troubles d'attention, de comportement ou langagiers. Nous entendons souvent dire que les ressources manquent pour faire un suivi adéquat. Je crois que tout enseignant qui a à coeur le développement de ses élèves doit être à l'affût des signes qui caractérisent de tels problèmes, et qu'il est le mieux placé pour les identifier. En tenant un registre des signes et des changements constatés sur ces enfants, l'intervention de l'enseignant peut faire une grande différence. Cela demande un peu de temps, certes, mais je crois que ces tâches doivent  faire partie intégrante du travail des enseignants qui passent plus de temps que quiconque avec les enfants. Leur formation universitaire devrait d'ailleurs être dirigée en ce sens.



Josée Côté, Trois-Rivières

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Forcés par les tribunaux



François Cardinal décrit très bien la problématique dans son éditorial.  Essentiellement, depuis 25 ans, il n'y a que deux facteurs qui sont considérés face à l'intégration de la clientèle EHDAA (élèves handicapés et en difficulté d'adaptation et d'apprentissage): les ressources budgétaires et la volonté des parents. Toutes les commissions scolaires reçoivent une enveloppe budgétaire spécifique pour leurs élèves EHDAA. Avec cet argent, elles se doivent d'organiser des services adaptés aux caractéristiques et aux besoins de la clientèle: orthopédagogie, classes ressources, classes spécialisées, élèves intégrés, éducation spécialisée, orthophonie, psychologie, psycho-éducation, préposés aux élèves handicapés, toxicomanie, transport adapté, etc. Au début des années 80, de plus en plus de parents ont voulu que leur enfant, quel que soit le handicap ou la difficulté dont il était atteint, soit intégré en classe ordinaire dans leur école de cartier.  Une multitude de plaintes aux Droits de la personne et plusieurs batailles juridiques ont eu lieu. La notion de préjudice grave au développement de l'élève était invoquée, par les commissions scolaires, pour favoriser son classement dans groupes spécialisés. Or, les Droits de la personne et les tribunaux ont donné priorité aux besoins de socialisation des élèves, favorisant ainsi son intégration dans son école de cartier et le plus souvent dans une classe ordinaire, obligeant, du même coup, les commissions scolaires à offrir à ces enfants des services particuliers et adaptés à leurs besoins. Face à ce nouveau courant de pensée et à l'épaisseur des factures d'avocats, le ministère, les commissions scolaires et les écoles n'ont eu d'autre choix que de s'adapter. Depuis, le nombre d'élèves intégrés n'a eu cesse de se multiplier.  Des facteurs sociaux, économiques, médicaux, culturels, psychologiques et tant d'autres, ont aussi favorisé l'alourdissement d'une clientèle dont les besoins se sont multipliés, complexifiés et spécifiés en même temps. La pauvreté, la défavorisation, le manque de stimulation, la négligence, la maladie mentale, la dépendance aux substances, le manque de ressources, les listes d'attente, les coupures de services, le stress, l'évolution des connaissances médicales, le dépistage précoce, etc., en sont l'explication et ne font que multiplier et complexifier les solutions.



Sachant que l'enveloppe budgétaire ne grossira pas. Sachant que le soutien et l'accompagnement aux élèves, découlant de ces budgets, n'augmentera pas non plus et pourrait même s'amoindrir si on recrée des classes spécialisées.  Connaissant la jurisprudence face à l'intégration. On peut poser l'hypothèse que seuls des élèves présentant des retards de deux ans et plus au plan des apprentissages, ou ceux dont les parents croient aux bienfaits d'une classe spécialisée pour leur enfant, pourraient y accéder. Allons-nous voir renaître les classes DGA? Ces classes de 14 à 17 élèves, aux difficultés multiples et si diverses, dans lesquelles  les 4 petites heures d'éducation spécialisée qui y étaient accordées, ne parvenaient pas à supporter ni les élèves, ni l' enseignant.



C'est d'argent neuf dont non seulement nos enfants handicapés et en difficulté ont besoin, mais aussi les autres, plus favorisés, qui en bénéficieront par la même occasion. Les classes spécialisées, l'intégration, totale ou partielle, ainsi que toutes les autres formes d'aide qu'on apporte aux élèves sont nécessaires. Mais Dieu, et surtout le ministère de l'Éducation, nous gardent des solutions mur à mur, qui ont peut-être l'avantage de régler les problèmes des adultes et de budget mais qui ne répondent aucunement à ceux des enfants. Il ne faut jamais oublié que les mesures d'aide et de soutien à l'intégration sont accordées aux élèves, et non aux enseignants. Mais si les enseignants sont débordés et épuisés, c'est un signe tangible que ces mesures sont insuffisantes poUr les enfants. Les augmentations de salaire, les primes de dépassement,  la quincaillerie, l'uniforme et le vouvoiement ne sont que des bonbons pour adulte, du glaçage sur un gâteau trop salé et ne facilitent en rien l'apprentissage des élèves. Tout gouvernement qui souhaite former des citoyens autonomes et responsables, se doit de considérer l'éducation comme un investissement et non comme une dépense. Chaque citoyen scolarisé et bien formé rendra de bien meilleurs services à la société et rapportera d'avantage à l'état. Payer plus de taxes et d'impôt pour du matériel périssable qui sera périmé dès son entrée dans les classes, non merci. Mais mettre en place des ressources adéquates et adaptées pour aider nos enfants, former et supporter nos enseignants pour qu'ils soient mieux outillés, donner plus d'autonomie à nos écoles en matière de gestion et d'organisation des services aux élèves en difficulté, alors j'accepterai volontiers. Il faut cesser de considérer la ressource humaine comme étant indéfiniment élastique. Le petit bout de caoutchouc est à la veille de nous revenir en pleine figure. Les élèves continuent à décrocher et vont rejoindre les rangs des travailleurs au salaire minimum, des jobbers, des chômeurs, assistés sociaux, travailleurs au noir, et même de la criminalité. Il y a trop de profs qui décrochent aussi et qui vont voir ailleurs s'ils ne pourraient pas être plus heureux. D'autres restent et s'accrochent, jusqu'à l'épuisement professionnel ou jusqu'à devenir complètement indifférent. Et que dire des techniciens et des professionnels surchargés, qui ne savent plus où donner de la tête, qui passent tellement de temps à évaluer, à compléter des grilles et des dossiers qu'il ne leur reste presque plus de temps pour l'intervention directe aux élèves. Que dire aussi des directions d'école, qui passent le plus clair de leur temps, en réunion à la commission scolaire, avec les syndicats, dans leurs bureaux avec les parents, les intervenants sociaux, les élèves en crise, ceux qui sont  suspendus, ceux qui reviennent de suspension, parfois les profs quand ils arrivent à avoir un peu de temps; qui sont obligés d'apporter du travail à la maison ou de rester tard le soir pour faire le budget, rédiger des projets pour obtenir plus d'argent du Ministère? Ceux-là aussi commencent à être au bout du rouleau et il n'y a pas foule pour assurer la relève. Le débat sur l'intégration est un faux débat.   Le problème en est un de valeur.  Quelle valeur accordons-nous à l'éducation?  Que sommes-nous prêts à faire pour que nos jeunes reçoivent une éducation de qualité, qui réponde à ses besoins et que chacun vive la réussite, considérant que celle-ci peut être différente pour chacun?

Céline Gosselin, passionnée d'éducation depuis 33 ans



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Parents plus nombreux



Moi, je dis bravo, enfin une sage décision. Lorsque mes filles étaient à l'école au primaire il y a déjà de ça plus d'une vingtaine d'années, les parents d'enfants en difficulté étaient très présents aux réunions de parents par rapport aux autres, ce qui fait que ces enfants ont été intégrés. Et puis les groupes d'enfants par classe ont augmentés au fil des ans et ce qui devait arriver arriva: les enseignants furent débordés avec les changements de programmes ainsi que le ratio d'enfant par classe. Ce qui me surprend cependant, c'est le temps que l'on prend pour réaliser les dommages fait autant aux enfants en difficulté que les «normaux» c'est tout à fait aberrant. Je me pose la question; d'où viennent ces fonctionnaires du ministère ont-ils déjà été professeur dans ces classes? J'espère que toutes les opinions seront entendues par qui de droit et qu'elles ne deviendront pas autant de coups d'épée dans l'eau.



Johanne Arcand, Laval

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L'argent, toujours l'argent



Tout ça n'est qu'une question d'argent, il est bien évident que des enfants en difficultés n'ont pas leur place dans des classes dites normales, de même que les surdoués. Ces enfants, afin qu'ils s'épanouissent pleinement  doivent être encadrés correctement, mais le nerf de la guerre c'est l'argent toujours l'argent! Il est certain que l'intégration à tout prix ça coûte moins chère et les résultats on s'en fout, en autant que le ministère de l'éducation balance son budget!



Claude Lavoie



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Pensent-ils au bien-être de leur enfant?



L'intégration à tout prix? Bien sûr que non! Cette intégration tant recherchée, sans nuances et à tout prix, est un facteur de frustration et d'humiliation pour une très grande partie d'entre eux, un élément de régression pour les élèves dits «normaux» puisque l'attention de l'enseignant sera très souvent focalisée sur le ou les cas problème. Et que nos enseignants agissent ainsi est parfaitement correct mais les effets nuisibles que cela entraîne ont été démontrés. Une éducation en parallèle, pour une bonne partie de ces élèves en difficulté, est de beaucoup préférable; même si certains parents s'en sentent offusqués et brimés. Ces parents pensent-ils vraiment au bien-être de leur enfant quand ils agissent ainsi? Tout en préconisant cette approche, il faut toujours garder en tête l'idée de les réintégrer si, et seulement si, une progression et un développement importants sont constatés. Reste à voir si le gouvernement est prêt à financer les institutions nécessaires pour remplir ce rôle. Rien n'est moins sûr.



Mariette Payeur