Nous sommes en l'an 2000 dans l'institution connue autrefois sous l'appellation École des hautes études commerciales.

Nous sommes en l'an 2000 dans l'institution connue autrefois sous l'appellation École des hautes études commerciales.

La professeure, et docteure de surcroît, utilise un rétroprojecteur (plus que rétro) pour présenter les mêmes acétates d'une session à l'autre. Pour s'assurer de manquer d'originalité, on utilise le même exemple d'une société de tapis depuis plus de 15 ans pour vulgariser les ratios financiers. Cette fameuse étape consiste à mettre en perspective les données comptables pour relativiser l'effet de grandeur.

Récemment, Warren Buffett a mis la main sur une importante quantité d'actions d'Apple. Les deux événements sont liés par un dénominateur commun :  le ratio cours-bénéfice.

Le grand public s'attarde souvent au prix de l'action et à sa tendance. On s'étonne parce que l'action d'entreprises comme McDonald's ou Facebook valent plus de 100 $ US.

Se fier à la valeur absolue d'une action n'a aucun sens, car elle peut avoir été fractionnée ou il peut y avoir un nombre d'actions émises variable d'une société à l'autre.

Pourtant, on néglige un outil évocateur pour comprendre ce que l'on achète :  le ratio cours-bénéfice.

Ce ratio représente le résultat de la valeur boursière d'une action divisé par le bénéfice par action. Plus simplement, le résultat équivaut à dire par quel multiple du bénéfice annuel par action je paie celle-ci.

Donc, vous êtes excités par la progression boursière de Facebook ? Son ratio cours-bénéfice est de plus de 73 fois le bénéfice. En somme, quand vous achetez une action de la société dominant les réseaux sociaux, vous payez 73 ans de bénéfices actuels. C'est beaucoup ?

Attendez, pour Amazon, le calcul équivalent donne 292 ! Avec un ratio de la sorte, il faudrait 292 ans à l'entreprise avec les profits actuels pour atteindre la somme que vous avez investie. Ça risque d'être long pour faire doubler votre REER si la croissance des bénéfices de l'entreprise n'est pas mirobolante !

Pour McDonald's ? Plus de 24 fois. Pourquoi payer tant de fois les bénéfices ? Une seule réponse logique : vous anticipez une croissance phénoménale des bénéfices de certaines entreprises. Pour l'instant, vous achetez une promesse de croissance, parce que les bénéfices comptables passés vous envoient un autre signal.

Donc, vous croyez qu'Amazon aura une croissance des bénéfices significativement plus élevée que Facebook ? Sur quel horizon ?

L'investisseur moyen est comique : il prend trois semaines pour acheter un vélo et négocier sérieusement le prix final, mais il achète des actions au gré du vent boursier.

BUFFETT ET APPLE

Pourquoi Warren Buffett a-t-il acheté massivement des actions d'Apple ? Le ratio cours-bénéfice actuel de la pomme croquée vacille entre 10 et 11. On paie de 10 à 11 ans de bénéfices actuels pour acheter Apple.

Donc, Buffett est cohérent avec sa stratégie habituelle. Il achète près de 1 milliard en valeur boursière d'Apple parce que l'entreprise a démontré qu'elle donnait un rendement sur capital investi récurrent depuis plusieurs années.

De plus, malgré les cycles technologiques rapides, l'entreprise réussit à renouveler ses produits. La baisse récente des ventes de l'iPhone a fait vivement réagir les marchés à la baisse. L'action frôlait les 130 dollars US en juillet dernier. Elle vaut moins de 94 $ US au moment d'écrire ces lignes. Warren Buffett semble considérer que la valeur intrinsèque de l'entreprise est plus élevée que la cote boursière. Comme dit l'expression connue « buy low, sell high ».

Qui est Warren Buffett ? La culture générale est aussi économique. Le ratio cours-bénéfice en fait partie. Je ne sais pas si la professeure de HEC Montréal utilise encore son exemple d'entreprise de tapis, mais le ratio cours-bénéfice fait maintenant partie de mon quotidien. Et vous ? À moins que vous soyez allergiques aux tapis...

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