Les coupes budgétaires à la Société CBC/Radio-Canada font réagir. Certains remettent en cause l'existence même d'un diffuseur public. Peut-être sommes-nous collectivement en train d'oublier l'importance de l'information? Le mandat premier d'un diffuseur public repose sur la démocratisation de l'information.

À travers des émissions d'affaires publiques ou d'enquêtes, des reportages, des bulletins de nouvelles ou des documentaires, la société d'État participe à la culture du savoir. Comme l'information constitue une partie primordiale du pouvoir, il n'est pas un luxe, mais un devoir collectif de s'assurer de la survie de Radio-Canada.

En théorie du management, on définit le concept de décision rationnelle. Lorsqu'un gouvernement doit prendre une décision dans un contexte d'incertitude, il est soumis à un processus décisionnel. Des limites existent à ce type de prise de décision. Parmi celles-ci, on précise la capacité à obtenir de l'information de qualité en temps opportun. En somme, la mauvaise information mène possiblement aux mauvaises décisions. 

Pour qu'une société puisse prendre des décisions adéquates, elle se doit d'avoir une source d'information crédible, non biaisée et libre de tout intérêt personnel ou corporatif. Éliminer le diffuseur public à petit feu, c'est en quelque sorte provoquer la destruction volontaire de l'information en quête d'objectivité. Prenons en comparaison l'industrie pharmaceutique et les recherches universitaires. L'industrie pharmaceutique ne fait de la recherche dans un domaine que si la découverte projetée débouche sur un produit rentable. Par opposition, la recherche universitaire permet la quête de solutions moins rentables, mais nécessaires pour le bien public. 

Les diffuseurs privés ont une prémisse: générer un contenu pour le public cible rapportant le meilleur rendement qualité prix. En tant que citoyens, nous avons le droit et le devoir d'exiger une rigueur budgétaire du diffuseur public. Par contre, cet équilibre budgétaire doit s'harmoniser avec le devoir premier de Radio-Canada: protéger le public contre l'ignorance. 

Outre cela, une télévision d'État est un reflet amélioré de nous-mêmes: une version finie, une image de fierté de la société dont nous faisons partie. Radio-Canada, c'est l'accessibilité de l'information et non la multiplication des opinions.

Certes, le monde des communications est en plein bouleversement. La tarte des revenus s'effrite et les télédiffuseurs et radiodiffuseurs perdent une partie des auditeurs et téléspectateurs captifs du passé. L'avenir semble s'orienter vers le contenu multiplateforme et la capacité à générer du contenu à un auditoire important: ce qui explique peut-être la surenchère sur le contrat de télédiffusion des matchs des Canadiens de Montréal. L'avenir est incertain pour une industrie où la technologie change les habitudes de consommation des abonnés. 

Dans un climat de guerre de cotes d'écoute et de contenu, la Société CBC/Radio-Canada contribue à augmenter le standard de qualité de l'industrie et à préserver l'expression culturelle d'ici. Comme stipulé dans la mission même de la société, on doit offrir des «[...] services de radio et de télévision qui comportent une très large programmation qui renseigne, éclaire et divertit.»

Avec la prolifération des nouvelles sur les médias sociaux, le nerf de la guerre se situe dans la crédibilité de la source. Dans cette ère de partage instantané, certaines personnes en viennent même à confondre les nouvelles satiriques avec les véritables informations. Préservons Radio-Canada, parce que le monde dans lequel on vit se définit autrement que par les votes à un dollar d'un concours de chansons.

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