Régis Labeaume part en croisade contre les déficits actuariels et les conditions des régimes de retraite des employés de la Ville de Québec.

Il est très populaire de s'en prendre aux fonctionnaires municipaux et provinciaux: certains animateurs de radio en font même un leitmotiv. Devant le manque de ressources financières des villes, on se lance dans un débat sur la capacité de payer de celles-ci et non sur la valeur du service reçu. Entre populisme et réalité, on doit établir des prémisses sur lesquelles les parties patronales et syndicales de toutes les villes du Québec devraient être en accord avant de négocier.

Premièrement, qu'est-ce qu'un régime de retraite? En principe, il représente un salaire différé: la renonciation d'un salaire présent contre le choix de bénéficier d'une certaine rente à la retraite. Par conséquent, un employé bénéficiant d'un fonds pension devrait, en théorie, recevoir un salaire moindre que celui faisant un travail équivalent sans bénéficier d'un régime de retraite de son employeur (toutes choses étant égales par ailleurs).

Une autre prémisse à la négociation se situe dans la prise de responsabilité des déficits actuariels passés. Ceux-ci ne sont en aucun temps la responsabilité des employés. En effet, chaque année, les employés contribuent à leur caisse de retraite et gagnent la partie promise par l'employeur. L'argument demandant aux employés de combler le déficit actuariel passé équivaut d'exiger de ceux-ci de rembourser une partie de leur salaire passé.

Par contre, les conditions des régimes de retraite négociées à une autre époque ne peuvent être maintenues éternellement, puisque les hypothèses actuarielles évoluent. Entre 1982 et 2012, l'espérance de vie résiduelle à 65 ans a augmenté de 16,6% chez les femmes et de 33,3% chez les hommes, selon les données de l'Institut de la statistique du Québec. 

Comme les rendements des placements de l'actif du régime ne peuvent croître exponentiellement, il faudra jouer sur d'autres indicateurs. Ainsi, on ne peut pas bénéficier d'une retraite de plus en plus longue, sans modifier d'autres conditions comme le pourcentage de cotisation des employés, l'âge de la retraite, le montant de la rente future ou simplement le type de régime. C'est d'ailleurs le pari qu'a fait la Banque Laurentienne du Canada lorsqu'elle a converti son régime à prestations déterminées à un régime à cotisations déterminées.

De plus, si une ville a besoin d'un service, celui-ci a une valeur marchande. L'argument de baser la rémunération globale des employés sur la capacité de payer d'une ville est irrecevable. La bonne question à se poser: la ville a-t-elle le moyen de se payer ledit service? 

Il arrive qu'il soit moins coûteux de maintenir des employés au service d'une ville plutôt que d'utiliser la sous-traitance du secteur privé. En voulant faire des compressions draconiennes dans les conditions de travail des employés, on pourrait se retrouver collectivement à perdre des ressources expérimentées et faire éventuellement appel à de la sous-traitance plus dispendieuse.

Nous sommes peut-être devant une redéfinition du contrat de travail entre les parties patronales et syndicales. Mais, il faudra un jour ou l'autre redéfinir la façon de payer les services collectifs d'une ville et de sa région métropolitaine. En attendant, les maires peuvent aussi rationaliser certaines dépenses. 

À Québec, on cherche des ressources pour combler le déficit actuariel de l'ancienne Ville. Pourtant, on n'a eu aucune difficulté à trouver des dizaines de millions de dollars pour financer un amphithéâtre, dont l'exploitation génèrera des flux monétaires négatifs dans son ensemble. Question de priorités électorales, j'imagine.

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