Que Graham Fraser se rebiffe d'entendre que l'anglais est une «langue étrangère» au Québec, on le comprend, il est le commissaire aux langues officielles du Canada. De voir les partis de l'opposition monter aussi aux barricades, c'est plus difficile à saisir. En effet, l'Assemblée nationale du Québec a décidé, il y a longtemps, que la langue officielle de la nation québécoise, c'est le français.

La minorité anglo-québécoise a des droits qui sont reconnus et respectés, mais cela ne fait pas de l'anglais l'une des langues officielles de la nation québécoise. La connaissance d'une ou de plusieurs langues secondes est un atout personnel. D'ailleurs, nos concitoyens l'ont bien compris puisque, selon les données du recensement de 2011 publiées par Statistique Canada mercredi, la hausse du bilinguisme au Canada provient principalement de l'accroissement du nombre de Québécois bilingues.

La connaissance de la langue commune, le français, est une richesse non seulement individuelle, mais aussi collective. Le français est au coeur de l'identité québécoise et constitue la langue commune de tous les Québécois, peu importe leur origine. C'est la langue de la délibération dans l'espace public et la langue qui cimente la cohésion de la nation québécoise dans toutes les sphères d'activité, que ce soit la culture, l'économie ou la solidarité sociale. La force de la langue française est le gage d'un Québec fort, et non pas du folklore.

Bien avant l'adoption de la Charte de la langue française, les Québécois ont voulu que leur État légifère pour défendre et promouvoir leur langue commune, conscients de l'environnement anglophone en Amérique du Nord et du rôle négatif du gouvernement canadien. Je pense entre autres à sa politique du multiculturalisme qui freine l'intégration harmonieuse des nouveaux arrivants à la société québécoise et au refus du fédéral d'accepter que la Charte de la langue française s'applique sur le territoire québécois aux 250 000 travailleurs des entreprises sous sa juridiction.

Les données du recensement 2011 montrent à quel point la situation du français est catastrophique au Canada et fragile au Québec. Une révision en profondeur de la Charte du français est nécessaire et les idées avancées par le gouvernement du Parti québécois méritent d'être débattues avec sérieux. Favoriser la présence du français dans les CPE et faciliter les succès académiques des enfants d'immigrants lors de leur entrée au primaire en français, c'est leur rendre service.

Entre le secondaire et le collégial, un transfert important se fait vers le réseau anglophone qui est fréquenté pour la moitié des effectifs par des allophones et des francophones. On ne peut pas camoufler cette réalité.

Pour réduire la place démesurée que tient l'anglais dans le monde du travail à Montréal, une nouvelle Charte devra aussi renforcer la présence du français dans les milieux de travail en élargissant sa portée, mais aussi en s'assurant de son application effective.

Comme le rappelait Camille Laurin, «la langue est le fondement même d'un peuple, ce par quoi il se reconnaît et il est reconnu, qui s'enracine dans son être et lui permet d'exprimer son identité». Et c'est toujours vrai.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion