Du 30 novembre au 11 décembre aura lieu la Conférence de Paris de 2015 sur le climat. Les responsables politiques du monde entier vont viser un accord universel et contraignant permettant de lutter efficacement contre le dérèglement climatique.

Cet accord devrait entrer en vigueur en 2020. Il formaliserait les objectifs de réduction des gaz à effet de serre (GES) de chacun des pays, mais surtout établirait les conséquences du non-respect des cibles de réduction. C'est en ce sens qu'il serait contraignant.

Le gouvernement Harper avait annoncé une cible de 30 % sous le niveau de 2005, d'ici 2030 (soit 14 % sous le niveau de 1990). Le nouveau gouvernement Trudeau refuse pour l'instant d'annoncer une autre cible, et prévoit bâtir le cadre pancanadien de lutte contre les changements climatiques en consultant les provinces dans les 90 jours suivant la Conférence de Paris. 

Le Québec, qui se présente comme un « chef de file » dans la lutte contre les changements climatiques, propose une cible de 37,5 % sous le niveau de 1990 pour 2030. En 2013, nous étions 8 % sous le niveau de 1990. En faisant l'hypothèse que nos émissions en 2015 sont égales à celles de 2013 (ce qui est réaliste, étant donné qu'elles sont stables depuis 2010 à environ 82 millions de tonnes), il faudrait chaque année réduire nos émissions de 1,8 million de tonnes pendant les 15 prochaines années. Ce changement annuel représente, par exemple, un retrait de 500 000 voitures qu'il faudrait répéter 15 fois (sauf que le parc automobile québécois ne compte que 5 millions de véhicules). On pourrait aussi fermer toutes les alumineries du Québec, cela représenterait trois ans de réduction. En cessant d'élever des vaches aux Québec, on réaliserait un peu moins de deux ans de réduction requis.

Des changements majeurs devront ainsi être réalisés dans les 15 prochaines années si nous voulons atteindre cette cible de réduction de GES de 2030. Des changements qui auront des impacts sur les transports, nos industries, nos bâtiments (chauffage et climatisation) et ce qu'on mange.

Pour établir cette cible de 37,5 %, le gouvernement québécois a suivi la recommandation de son Comité‑conseil sur les changements climatiques, composé de 15 personnes issues des ONG environnementales, du monde des affaires et des universités. Il a aussi mené des consultations particulières où 40 témoignages ont été entendus, issus d'ONG de tous horizons et du monde des affaires.

S'il y a unanimité autour de la nécessité de lutter contre les changements climatiques, beaucoup de préoccupations ont été soulevées sur la capacité du Québec à réaliser ces réductions de GES.

Le Québec est en effet dans une position unique : alors que la production d'électricité à l'échelle mondiale est la plus grande source de GES, notre hydroélectricité rend déjà ce secteur « propre » au Québec. Par ailleurs, nos industries avaient collectivement déjà réduit de 20 % leurs émissions en 2013 sous le niveau de 1990... mais pas seulement parce qu'elles sont plus efficaces. Certaines ont fermé : pensons à des papetières ou à la raffinerie Shell. On ne pourra pas demander beaucoup plus au secteur industriel, à moins de souhaiter le faire disparaître.

Contrairement au gouvernement californien, notre principal partenaire dans notre marché du carbone et qui a un plan très fouillé sur les approches possibles pour réduire ses GES, notre gouvernement semble ne pas s'être penché sérieusement sur la manière d'atteindre ses cibles. Aucune analyse détaillée, secteur par secteur, n'a été réalisée. C'est très inquiétant, surtout sachant le peu de temps que nous avons et les ressources limitées dont nous disposons. Au-delà de la cible, ce sont les moyens que nous allons concrètement mettre en oeuvre qui vont compter : comment mieux nous transporter, mieux produire, mieux nous loger, mieux manger ? Réduire les GES aura des implications à tous les niveaux. Un chef de file doit mieux se préparer, s'il ne veut pas rater ses cibles.

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