Ce sont parfois de petits détails qui font toute la différence dans la motivation scolaire des jeunes, des coups coeurs ressentis lors d'expériences qui marquent leur parcours et font naître chez eux rêves et aspirations professionnelles. Ainsi, c'est en participant aux concours oratoires organisés par les Clubs optimistes de ma région qu'est né mon désir de devenir avocate et c'est en conjuguant sa passion pour le sport à son expérience à la radio étudiante que mon amoureux a rêvé d'embrasser une carrière de journaliste sportif.

Je suis consternée par la désinvolture avec laquelle le gouvernement a décidé de couper dans le programme Chapeau, les filles! en abolissant les concours régionaux. De surcroit, cette décision semble avoir été prise en catimini avec l'espoir, sans doute, qu'elle passerait inaperçue. Des institutions n'ayant pas reçu la documentation nécessaire aux inscriptions en novembre, comme le veut la coutume, ont sonné l'alarme avant que le gouvernement confirme la rumeur, en offrant toutefois la mince consolation que le concours national serait maintenu.

Contrairement au changement de cap du gouvernement en décembre dernier dans le dossier du financement des organismes scientifiques, incluant les très crédibles et appréciés magazines Les débrouillards, Les explorateurs et Curium, aucune volte-face ne semble possible cette fois-ci, alors que le mouvement de contestation s'avère bien timide. Pourtant, il s'agit ici aussi d'un programme dont le but est de stimuler l'intérêt et la motivation des jeunes, des femmes plus précisément, envers les sciences et les métiers traditionnellement masculins. Je veux bien me garder de traiter le gouvernement de misogyne, mais j'estime néanmoins que les circonstances sont troublantes et que c'est un bien étrange message qu'envoie là le gouvernement, à une époque où on nous sert le discours de l'égalité à toutes les sauces.

Selon un rapport publié en novembre 2007 par le Conseil canadien sur l'apprentissage, plus de filles que de garçons estiment que les sciences sont une discipline difficile, alors qu'elles manifestent une perception moins favorable de leurs capacités que les garçons, même si leurs résultats scolaires ne sont pas substantiellement différents dans ces matières. Les chercheurs sont d'avis que ce sont plutôt des facteurs culturels et environnementaux, et non biologiques, qui influent sur les choix de carrière et les intérêts des jeunes filles.

Par ailleurs, ce rapport confirme que la sous-représentation des femmes dans les sciences contribue à l'écart salarial entre les sexes. Au fil des années, les salaires réels ont baissé dans les disciplines à prédominance féminine, comme les soins de santé et l'éducation, tandis qu'ils ont augmenté dans les disciplines à prédominance masculine, comme le génie, les mathématiques, l'informatique et les sciences physiques. Autant de raison, donc, d'intervenir positivement afin d'encourager les femmes qui se tournent vers des métiers scientifiques et non traditionnels.

L'objectif que s'est fixé le gouvernement de redresser les finances publiques est fort louable, mais par moments, nos décideurs semblent donner des coups de hache à la sauvette, charcutant tout ce qui leur tombe sous la main. Pourtant, le rapport coûts/bénéfices, avec une dépense totale pour ce programme de 64 000$ et près de 200 prix régionaux qui comptaient pour autant de tapes dans le dos, penche incontestablement en faveur de la survie de Chapeau, les filles!

La persévérance scolaire se révèle parfois bien fragile. La décision irréfléchie du gouvernement, qui n'y voit là qu'un item en moins sous la rubrique de son passif, vient sabrer dans les rêves d'étudiantes et saper la motivation de femmes qui ont choisi de se prendre en main et de sortir des sentiers battus en empruntant un chemin professionnel moins fréquenté. Ce qui se voulait être une tape dans le dos s'est malheureusement transformée en claque au visage.

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