Des têtes se sont plongées dans le déni et des pieds se sont traînés dans le dossier des écoles illégales, au rythme des gouvernements qui ont tour à tour fermé les yeux.

En septembre 2011, cette inertie de plusieurs décennies a même servi de motif à la Cour supérieure pour rejeter le recours du gouvernement du Québec qui, par la voie d'une requête en injonction, cherchait à obliger l'Académie Yeshiva Toras Moshe à cesser de tenir un établissement d'enseignement. Le tribunal a condamné l'inaction du gouvernement alors que depuis 1952, cette institution dispense sans permis, et sans être inquiétée, des «services éducatifs», qui ne respectent pas les exigences législatives québécoises, aux garçons de la communauté hassidique Satmar.

Malgré le rejet de la requête du gouvernement, la Cour a souligné qu'il était nécessaire qu'un procès soit tenu afin de trancher les questions délicates et les ramifications soulevées par cette affaire, notamment les droits des 163 enfants en cause et la véritable nécessité du régime pédagogique obligatoire adopté par l'État. Malheureusement, le procès suggéré par le tribunal n'a pas encore eu lieu et, échaudé par ce revers judiciaire, le gouvernement s'est depuis fait bien silencieux même si le problème, lui, demeure entier.

En février 2012, la Cour suprême a pourtant maintenu le refus d'une commission scolaire d'exempter des enfants du cour d'éthique et culture religieuse, précisant que l'exposition des enfants à des réalités autres que celles qu'ils vivent dans leur environnement familial immédiat constitue un fait de la vie en société qui ne porte pas atteinte à la liberté de conscience et de religion, garantie par les Chartes.

Bref, il y a assurément des arguments juridiques qui méritent d'être exploités pour s'attaquer aux écoles illégales. Il faut espérer que le nouveau ministre de l'Éducation aura le courage de passer de la parole aux actes afin de reconnaître la valeur et l'importance du droit à l'éducation pour tous les enfants.

Modèle réduit de notre société, la vie scolaire de nos enfants est faite de splendeurs et de misères, de victoires et de revers. Pour mon aîné, la troisième année aura été marquée par le défi des tables de multiplication et quelques vagues d'angoisse de performance qui se sont apaisées grâce à l'écoute et l'empathie de madame Julie. Pour mon cadet, ce fut la grande intégration à la maternelle. Qu'il est loin, le mois de septembre où, cachée derrière un buisson, le coeur en miettes, je l'entendais protester en sanglotant! Avec la patience de son éducatrice Josée et la douceur de madame Manon, mon timide chaton de salon s'est transformé en petit écolier enjoué.

L'idée n'est pas de laisser un pinceau romantique et nostalgique peindre un portrait plus rose que la réalité puisqu'évidemment, notre système d'éducation est imparfait et l'hôte d'incohérences et d'absurdités que nous avons le devoir, comme parents et contribuables, de dénoncer. Mais en cette semaine de fin d'année scolaire, où les classes se vident et les enfants reviennent à la maison les bras chargés de bricolages, la tête remplie de nouvelles connaissances et le coeur léger à l'aube des grandes vacances, un moment de recul s'impose pour apprécier l'ampleur du rôle que joue l'école dans le développement des citoyens de demain.

Des cris du coeur comme ceux de Yohan et Shifra («Ces prisons appelées «écoles» », La Presse, 26 mai 2014) rappellent que le droit à l'éducation n'est par ailleurs pas étranger au droit à l'égalité. Gage de liberté, d'indépendance et d'autonomie, l'éducation et son système laïque doivent être défendus et protégés, au nom de tous les petits Québécois, cultures et religions confondues, qui méritent d'être traités avec équité et égalité.

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