J'informe la gardienne de mon retard; je demande à mon amoureux de passer acheter du lait; je donne des instructions à mon adjointe; j'organise le prochain souper de filles. Tout ça par textos. En conduisant mon auto avec, bien souvent, mes lionceaux à bord. Honte à moi.

Est-ce que mon aveu de culpabilité me soulage la conscience? Si peu. Surtout que depuis quelques jours, les images de la publicité-choc de la SAAQ tournent en boucle dans ma tête et je suis hantée par les paroles de mon fils de 7 ans dont la mâchoire s'est décrochée à la vue des images saisissantes de ce vidéo de quelques secondes. Secoué et ébranlé, il s'est exclamé: «Maman! C'est comme tu fais tout le temps. Toi aussi, tu pourrais avoir un accident».

En effet. Je n'ai absolument aucune excuse valable, mais une douteuse explication: je cours après ma queue, après mon souffle, après mon temps; bref, je cours tout le temps. Brutal constat d'une mère de famille qui travaille à temps plein. Cette merveilleuse invention qu'est le texto me permet d'entretenir l'illusion que je suis en parfait contrôle de ma vie et que j'améliore mon coefficient d'efficacité en accomplissant plusieurs tâches à la fois.

Je suis généralement agacée, voire exaspérée, par les publicités qui me renvoient à mes travers et mes défauts en me rappelant toutes ces bonnes actions que je ne pose pas. Manger cinq portions de fruits et de légumes quotidiennement, rincer les contenants avant de les mettre au recyclage, acheter des couches lavables pour mes bébés. À ce jour, je restais donc plutôt insensible aux messages de prévention sur les textos au volant et, comme le fumeur qui ignore les avertissements sur les paquets de cigarettes, je plongeais ma tête d'autruche dans le sable du déni.

Pourtant, l'envoi de textos au volant s'impose comme la conduite avec facultés affaiblies des temps modernes. Il fut un temps où prendre le volant avec une bière entre les deux jambes était valorisé et glorifié. À une époque où le téléphone intelligent est devenu un véritable prolongement de nous-mêmes, un petit appendice sans lequel nous ne pouvons plus vivre ni fonctionner, couper le cordon qui nous y unit devient un douloureux exercice de sevrage.

Si les chiffres de la SAAQ révèlent que ce phénomène est particulièrement répandu chez les jeunes hommes de moins de 35 ans «qui ont le texto en excroissance au bout des doigts», je suis convaincue que la problématique est beaucoup plus vaste. J'en suis un exemple repentant. Les mentalités sur la conduite avec les facultés affaiblies ont changé grâce aux larges campagnes de sensibilisation, mais aussi à la suite du durcissement des lois. Il semble, parfois, que seule l'imposition de sanctions sévères puisse venir à bout de comportements délinquants. Parlez-en à mes enfants... Il faut donc espérer qu'au-delà de ces images percutantes, le gouvernement reverra sa position sur l'amendement de la loi et la majoration des sanctions. Je persiste à croire que l'un ne va pas sans l'autre afin de s'attaquer avec succès à cette pratique et en réduire l'incidence.

Dans l'intervalle, je confirme l'efficacité de cette publicité-choc, je fais mon mea-culpa et je m'engage à ne plus texter au volant. Je l'ai d'ailleurs promis à mon fils.

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