Les États-Unis seraient en retrait par rapport au monde, dit-on, dans certains médias conservateurs américains et chez les républicains. Ils seraient restés passifs lors de la crise libyenne. Ils se montreraient trop prudents quant aux pratiques «agressives» de la Chine et de la Russie. Ils auraient capitulé devant la Syrie et l'Iran.

Le discours sur l'état de l'Union du président Obama, mardi, devrait conforter ce constat auprès de ceux qui le colportent. Le président y a renouvelé son refus de la guerre comme principal outil de régulation des conflits. C'est pourtant une excellente nouvelle, et pour les États-Unis, et pour le monde.

Ce n'est pas la première fois que Barack Obama refuse la fatalité de la guerre pour une grande puissance comme la sienne. Il s'est fait élire sur un programme anti-guerre et a tenu cette promesse: les troupes américaines ont quitté l'Irak et s'apprêtent à faire de même en Afghanistan d'ici la fin de l'année. Il a refusé de jouer un premier rôle dans la chute du colonel Kadhafi. En Syrie, il a usé de la diplomatie et de la menace de la force pour obtenir la neutralisation complète de l'arsenal chimique syrien.

Au sujet du programme nucléaire iranien, il a opté pour le dialogue et la négociation. Enfin, sur le terrorisme, dans un discours prononcé en mai dernier et qui fera date, il a marqué une rupture nette avec son prédécesseur: il a rejeté l'idée d'une guerre perpétuelle et a affirmé que les États-Unis doivent cesser de réagir comme si «tout groupe de voyous qui s'attribue l'étiquette Al-Qaïda représentait une menace crédible pour les États-Unis».

Devant les membres du Congrès et les Américains, le président a accentué son message anti-guerre. Il est le commandant en chef et à ce titre il se doit de défendre la sécurité et les intérêts de son pays. L'outil militaire est entre ses mains et il n'hésitera pas à s'en servir.

Mais au bout de cette logique, il y a le refus des guerres accessoires, des guerres criminelles comme celles déclenchées par George W. Bush et Tony Blair contre l'Irak. «Je refuse, a-t-il lancé, d'envoyer nos troupes affronter le danger à moins que ce ne soit absolument nécessaire, et je ne permettrai pas que nos fils et nos filles s'enlisent dans des conflits sans fin.»

Après cinq ans de pouvoir, le président, juriste, homme d'État et père de famille, a compris deux choses. Premièrement, les États-Unis jouissent d'une sécurité presque absolue et aucune puissance de leur calibre n'émerge à l'horizon. Obama rejette donc cette idée fausse colportée par certains militaires et commentateurs et qui infecte le discours public sur la vulnérabilité supposée du pays et sa marginalisation diplomatique et militaire.

Deuxièmement, le président a pris la mesure du profond malaise du peuple américain relativement à l'usage de la force. Non seulement les Américains sont-ils fatigués des guerres, mais ils restent humiliés et choqués par les mensonges et les manipulations dont ils ont été l'objet afin de leur arracher un appui.

En balisant les raisons qui justifient l'usage de la force, le président Obama ne s'est pas montré faible, n'a pas renoncé à ce que son pays exerce un certain leadership dans le monde. Au contraire. La force et le leadership seront, a-t-il dit, utilisés le moment venu et aux endroits appropriés.

Cette vision, pour ne pas dire cette doctrine, est un savant dosage de puissance et de sagesse dans un monde où les Occidentaux en général et les Américains en particulier n'en contrôlent plus tous les soubresauts.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion