La France a le blues. En moins d'un an, les troupes françaises sont intervenues au Mali et en Centrafrique. Et tout ne va pas très bien. Alors, forcément, plusieurs, en France comme en Afrique, s'interrogent sur le sens de ces interventions. Les critiques occupent le haut du pavé et dénoncent ce qu'ils considèrent comme une résurgence du « colonialisme » sous les oripeaux de l'humanitaire. L'opinion publique, pour sa part, doute de l'efficacité des interventions. Pourtant, la France n'a pas à rougir de son activisme diplomatique et militaire.

Il s'en est fallu de peu, le 10 janvier 2013, pour que Bamako, capitale du Mali, sombre dans le chaos lorsque des djihadistes et leurs alliés ont annoncé vouloir s'en emparer. Ils occupaient déjà la moitié du pays et, devant un pouvoir central paralysé par les luttes politiques, rêvaient d'installer au Mali ce que les talibans avaient fait en Afghanistan. En 24 heures, la France a mis fin à ce rêve dément et a permis aux Maliens de se ressaisir.

En Centrafrique, la France est intervenue tardivement au début de décembre. Le pays connaît une série de crises politiques et humanitaires depuis presque vingt ans, mais la dernière en date, déclenchée par un coup d'État au mois de mars, a provoqué des massacres et des destructions inconnues jusque-là. Toutefois, les troupes françaises semblent impuissantes à rétablir l'ordre dans la capitale, Bangui. Paris a sans doute mal évalué la complexité du drame centrafricain, mais il est difficile de lui en faire le reproche lorsque les acteurs africains régionaux présents en Centrafrique depuis 1997 se sont montrés incapables de trouver la moindre solution.

Devant l'urgence, la France a fait le pari de l'intervention. Mais, pour certains, l'intervention n'est pas qu'altruiste, si elle ne l'est jamais et cache nécessairement des motivations mercantiles, géopolitiques. Ainsi, la France reviendrait en Afrique pour reconstituer son petit empire, reprendre une place de plus en plus occupée par la Chine, ou exister sur la scène internationale. Alors, fallait-il abandonner le Mali aux djihadistes et la Centrafrique aux milices? À lire certains critiques qui s'expriment dans la presse française, c'est comme si les Maliens et les Centrafricains avaient à choisir entre la peste et le choléra.

Ces critiques, parfaitement stériles, sont le résultat d'une analyse d'un autre âge. La vraie question, celle que se posent les Français et les autres dans le monde est ailleurs : les interventions au Mali, en Centrafrique ou dans tout État failli peuvent-elles donner, un tant soit peu, des résultats malgré leur caractère invasif et parfois brouillon?

Vrai, les problèmes de fond ne sont pas réglés. Tous ceux qui étudient sérieusement les États en déliquescence et les interventions pour leur venir en aide savent que les chemins de la reconstruction politique, sociale et économique sont toujours semés d'embûches et le succès loin d'être assuré. Haïti, près de chez nous, en est un bon exemple. L'ONU est sur place depuis avril 2004 et on voit mal quand sa mission de paix et de reconstruction pliera bagage, tellement le pays reste fragile, surtout depuis le tremblement de terre d'il y a quatre ans.

Les Français, mais aussi les autres peuples occidentaux, ont des réactions contrastées devant les interventions. Les Français sont 64 % à s'opposer à l'intervention en Centrafrique, mais, étrangement, ils étaient 45 % en faveur des frappes sur la Syrie. Les deux situations sont complètement différentes et une attaque contre la Syrie serait bien plus dangereuse que l'actuelle intervention en Centrafrique.

S'il y a des critiques faciles contre les interventions, il n'y a que des réponses difficiles aux problèmes de certains pays. Les interventions françaises en Afrique ouvrent au moins un espace afin de permettre aux Maliens ou aux Centrafricains de retisser les fils du vouloir-vivre ensemble. C'est tout à l'honneur de la France.

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