Depuis un an, l'effondrement successif des armées nationales malienne et congolaise devant des groupes rebelles ou terroristes éclaire une bien triste réalité: la plupart des armées africaines sont incapables d'assurer la sécurité de leur pays.

L'opinion publique occidentale a souvent l'impression que les armées africaines sont puissantes. Ce n'est pas faux. Ces armées ont provoqué une bonne centaine de coups d'État depuis les mouvements vers l'indépendance dans les années soixante.

Un coup d'État en Afrique est un acte qui reste relativement facile à faire: une cinquantaine de militaires équipés de véhicules blindés ou de quelques chars peuvent renverser un gouvernement en quelques heures. L'armée étant la seule institution vraiment organisée et disposant de la force des armes, elle est effectivement dangereuse pour les pouvoirs en place et les populations.

Pourtant, les armées africaines sont en piteux état. En décembre dernier, bien avant la débandade complète de l'armée malienne et l'intervention française, l'hebdomadaire Jeune Afrique publiait sur ces armées un dossier-choc sous le titre peu flatteur de «Pourquoi sont-elles si nulles?»

Selon les auteurs, les armées africaines sont composées de «soldats de parade, aussi remarquables les jours de défilé qu'inaptes sous le feu.» Cela est le résultat des sept péchés capitaux dont elles souffrent: un commandement incompétent, un service de renseignement négligé, une logistique défaillante, un équipement insuffisant, une corruption endémique, des gardes présidentielles toutes puissantes et un moral à zéro.

Le constat n'est pas tendre, même si certaines armées (Afrique du Sud, Kenya, Ouganda, Rwanda et Sénégal) ont une bonne réputation et même si leur comportement au sein des opérations de paix est tout à fait respectable. C'est en situation de combat que ces armées défaillent et se délitent.

Alors, pour affronter des groupes rebelles ou terroristes, en Somalie, au Congo démocratique, au Mali ou ailleurs, les armées africaines sont à rebâtir. Le travail a commencé en Somalie où depuis sept ans, le gouvernement légitime reprend lentement le contrôle de la capitale et d'une bonne partie du territoire grâce à l'appui financier et matériel de la communauté internationale et à la présence d'une force africaine de paix.

Au Mali, ce travail reste à faire. Il a reçu mardi un puissant soutien de la communauté internationale. À Addis Abeba, en Éthiopie, une soixantaine de pays ont promis une aide de 455 millions de dollars afin de former l'armée malienne et de soutenir le déploiement d'une force africaine de maintien de la paix chargée dans quelques mois de remplacer les forces françaises dans le nord du Mali. L'engagement politique et financier apparaît sérieux d'autant plus que, pour la première fois de son histoire, l'Union africaine y consacrera quelque 60 millions de dollars de ses fonds propres.

Rétablir l'autorité du gouvernement malien au nord du pays ne se fera pas facilement. Le Mali n'est pas la Somalie et la reprise en deux semaines des grandes villes du nord par les forces françaises le démontre bien. La difficulté qui s'annonce est ailleurs. Il faudra non seulement tenir les villes, mais aussi exercer un minimum de contrôle à l'extérieur des centres urbains sur un territoire grand comme la France.

Afin d'y arriver, les forces maliennes et celles de la mission de paix africaine auront besoin de vigoureux programmes de formation et d'un soutien logistique et matériel de longue durée. Aider les armées africaines peut aussi être un facteur de paix et de stabilité.

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