Si La Presse a pu traverser les dernières décennies en s'améliorant sans cesse malgré les turbulences économiques, si elle offre aujourd'hui à ses lecteurs une qualité de contenus inégalée, si elle est en mesure de prendre avec enthousiasme le virage numérique, c'est grâce à l'appui inébranlable que lui a toujours accordé M. Paul Desmarais. Tous ceux qui ont eu le privilège de travailler à La Presse, dont je suis, lui seront à jamais reconnaissants de cette fidélité.

M. Desmarais a acquis La Presse en 1967. Il voulait «donner au Québec la même sorte d'influence dans les groupes de journaux que celle qu'avaient Southam, Thomson et le Financial Post». À ses yeux, la présence au Québec d'un journal de grande qualité accroîtrait l'influence des Canadiens français dans l'ensemble du pays. 

Paul Desmarais était convaincu qu'une presse solide et de qualité est essentielle à la vitalité d'une démocratie. De plus, il avait compris que pour atteindre l'excellence, une salle de rédaction doit être libre. C'est pourquoi il s'est toujours fait un devoir de ne pas intervenir dans le contenu de La Presse. Et il a toujours été disposé à investir de sorte que les artisans du journal disposent de tous les outils dont ils avaient besoin pour accomplir leur mission et exprimer leurs talents. Si, comme tout propriétaire de journal, il tenait à ce que les positions éditoriales sur quelques enjeux cruciaux reflètent ses convictions, il était aussi convaincu qu'un quotidien de qualité devait offrir à ses lecteurs une vaste diversité de points de vue. 

Celui que nous appelions affectueusement «Monsieur Père» aimait profondément La Presse. Bien que ses affaires aient exigé qu'il voyage beaucoup, il est toujours resté un lecteur assidu de «son» journal. Plus qu'un propriétaire, Paul Desmarais fut un père pour La Presse. 

Sur le plan personnel, j'ai découvert chez ce brillant financier un humaniste, un homme simple et chaleureux. M. Desmarais n'aimait rien davantage que s'amuser et était par ailleurs un conteur extraordinaire. De plus, même dans les derniers mois de sa vie, il faisait preuve d'un sens inégalé des affaires; rien ne lui échappait. Paul Desmarais était rigoureux et respectueux. Ces traits de personnalité ont marqué La Presse et ont puissamment contribué à en faire le quotidien de référence qu'elle est aujourd'hui. 

Le patron de Power Corporation était d'une générosité aussi grande que discrète. Il lui arrivait souvent de remarquer dans La Presse un article sur une personne confrontée à des difficultés. Il obtenait ses coordonnées et lui venait en aide, sans que quiconque soit mis au courant. 

M. Desmarais a été profondément ému à la suite de la conclusion d'une entente historique, en 2009, pour le renouvellement des conventions collectives à La Presse. Il y a vu, avec raison, une démonstration de loyauté de la part des employés. À la suite de cette entente, Power Corporation s'est résolument engagée afin de permettre à La Presse de devenir une pionnière du virage numérique des journaux. Au nom de tous les employés et de la direction de La Presse, j'exprime notre profonde sympathie aux proches de M. Desmarais, en particulier à son épouse,

Mme Jacqueline Desmarais, et à ses enfants Louise, Sophie, Paul, jr, et André, président

du conseil d'administration de La Presse.