Les Québécois n'ont pas de poignée dans le dos, mais ils ont pas mal d'hameçons au-dessus de leur tête. Il ne manque pas de gens qui veulent les faire mordre dans le mensonge et l'insignifiance.

Alors que commence la campagne électorale, ces menaces ne manquent pas. Il y a les nouvelles bidon relayées sur Facebook, les médias citoyens proches de groupes comme La Meute, le vacarme des trolls et d'autres interférences dans le débat.

Ces menaces partagent un point en commun : le désabusement des électeurs. C'est de cela qu'elles se nourrissent.

Car plus on croit que les partis et les institutions sont tous pourris, plus on gobera les ragots et complots à leur sujet. Et c'est ainsi que la roue du cynisme tourne...

C'est d'ailleurs le paradoxe du cynique. Il se félicite d'être le grand lucide, celui qui voit à travers les masques. Mais au fond, il est moins sceptique que paranoïaque. Il pense tellement que tout est vicié qu'il est prêt à croire n'importe quoi.

À cela s'ajoute l'hyperpartisanerie, qui vient avec sa nouvelle définition de l'objectivité : celui qui est objectif, c'est celui qui pense comme moi.

Voilà en somme ce qui nous inquiète pour les cinq prochaines semaines : la contamination du débat démocratique.

Certes, les campagnes électorales n'ont jamais été tout à fait propres. On n'y voit pas que des arguments rationnels exprimés de bonne foi. La politique est une affaire de passions, un combat où la gentilhommerie est parfois facultative. Les candidats ont donc leur part de responsabilité.

Qu'y a-t-il de neuf ? La menace a évolué.

Avant, elle était plus opaque. Au dernier siècle, des dynasties politiques se sont construites et défaites à cause, entre autres, de l'influence occulte de l'argent. En fin de règne, l'unioniste Maurice Duplessis en était venu à incarner le trafic d'influence. Et lui-même avait été élu en promettant de mettre fin à la corruption du libéral Louis-Alexandre Taschereau.

Ces délits se règlent avec des lois et des enquêtes. Depuis, il y a eu la réforme du financement des partis politiques de René Lévesque, qui a été renforcée en 2012. Les dons et les dépenses des partis sont désormais limités. Certes, pour toutes sortes de raisons, chaque citoyen n'a pas un accès égal aux oreilles des ministres. Mais grâce aux nouvelles lois, l'influence de l'argent a énormément diminué.

Il est par contre plus difficile de s'attaquer à la désinformation.

Elle ne se cache pas. Au contraire, son but est d'être le plus visible possible. Bien sûr, on peut et on doit réglementer Facebook. Mais cela ne suffira pas à régler le coeur du problème.

Tant que le désabusement demeurera, la population restera réceptive à ce type de désinformation, et la trouvera ailleurs sur l'internet. Ou, ce qui n'est guère mieux, elle décrochera.

Il est vrai que cette campagne électorale ne fait pas rêver. Il n'y a pas de grand projet, mais il n'y a pas de crise non plus. Soyons honnêtes, le Québec ne va pas trop mal si on le compare à son passé ou à ses voisins.

On comprend que la politique n'intéresse pas tout le monde, et il est normal que chez d'autres, elle suscite des passions. Mais il n'y a pas de raison pour envenimer le débat en imaginant partout le pire. Tout le monde n'est pas toujours pourri à temps plein.

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La « bonté » de Facebook

Facebook a lancé des initiatives pour démasquer les faux comptes et rendre les fausses nouvelles moins visibles. Ne soyons toutefois pas dupes. C'était pour protéger son image et pour éviter que l'État réglemente l'entreprise.

Cela permet aussi au géant américain de prétendre aider les médias, alors qu'il les saigne en piquant leur contenu et en détournant leurs revenus, pour les abriter ensuite dans les paradis fiscaux. Mais ça, c'est une autre histoire...

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Le taux de participation

Le faible taux de participation est préoccupant, mais pas alarmant. En 2014, plus du quart des électeurs n'ont pas voté. C'est peu. Mais relativisons : le taux de participation égalait celui de 2003 et s'approchait de celui de 1966.

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