Pendant que les yeux sont tournés vers la crise au ministère des Transports, la gestion de l'informatique continue d'engloutir les fonds publics dans une relative indifférence.

La platitude du dossier n'aide pas. Il est en effet difficile de déchirer sa chemise en somnolant. C'est donc sous ce médiocre petit ronron que le même scénario se répète : des coûts qui explosent, une promesse d'agir, puis un autre rapport qui démontre que la fuite vers l'avant se poursuit.

Mercredi, la vérificatrice générale constatait à nouveau que peu de choses ont changé. Les consultants externes aident encore à définir les besoins, élaborer les appels d'offres, choisir les gagnants, puis faire le travail. En d'autres mots, le privé se sert.

Par exemple, pour son achat groupé de tablettes numériques, Québec a réussi à se négocier un prix de 493 dollars, soit 60 dollars de plus que le prix à l'unité affiché sur le site internet du fabricant. Dans un autre contrat, malgré une clause pour plafonner le prix, la facture finale a dépassé de 16 % la limite prévue.

On ne peut pas dire que le gouvernement ne fait rien. À chaque rapport du vérificateur, de nouvelles normes, règlements ou lois sont annoncés. Mais le message ne descend pas dans la fonction publique, là où se trouve le problème. C'est comme si on criait dans le désert. Voilà pourquoi le plan annoncé par le gouvernement Couillard suscite autant l'espoir que le scepticisme.

Son nouveau règlement est entré en vigueur ce printemps (les contrats examinés dans le rapport du vérificateur général n'en tiennent donc pas compte). Il met fin au règne du plus bas soumissionnaire et facilite les appels d'offres des plus petites firmes. De plus, un audit sera commandé sur chaque grand contrat.

Tout cela est bienvenu, mais le principal problème n'est pas la réglementation. C'est qu'elle n'est pas suivie, par manque de rigueur ou d'expertise.

Pour la renflouer, le Conseil du trésor a promis l'automne dernier d'engager 500 spécialistes. Près de 1700 candidats se sont préqualifiés, et plus de 100 ont été embauchés.

On part de loin. En effet, cela ne fait que deux semaines que Québec sait combien de spécialistes en informatique travaillent pour l'État. Ils n'étaient même pas recensés. Il faut dire que l'exercice n'était pas simple, car certains consultants externes étaient si bien « intégrés » à la bureaucratie qu'on était incapable de déterminer leur réel employeur...

Sans cette expertise, véritable colonne vertébrale, l'État continuera de s'agenouiller devant le privé, le chéquier en main. Québec doit donc remplir rapidement sa promesse. Ce n'est pas une dépense, mais un investissement.

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