Peut-être faudrait-il une photo esthétique de dollars canadiens échoués sur les plages de la Barbade pour parler un peu plus de paradis fiscaux.

Le sujet est étonnament peu débattu durant la campagne électorale. Pourtant, le pays a beaucoup changé à cet égard sous le gouvernement Harper. Il a régressé au début de son mandat, avant de faire un petit pas vers l'avant dans les derniers mois. Mais s'il a avancé, c'est parce que d'autres le poussaient dans le dos. Et il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.

Il faut distinguer trois concepts : l'évasion fiscale qui est illégale, l'évitement fiscal qui détourne l'esprit de la loi sans la violer, et la planification fiscale que la loi autorise et parfois même encourage.

En 2008, pour éviter d'apparaître sur une liste noire, les paradis fiscaux ont été forcés de conclure des ententes avec d'autres États. Le Canada avait donc un grand pouvoir de négociation, mais il n'en a pas profité.

Ottawa aurait pu exiger que les paradis fiscaux lui transmettent automatiquement la liste de ses citoyens et sociétés qui y détiennent des actifs, afin de démasquer les fraudeurs. Mais on n'a obtenu que la possibilité de demander des informations sur un cas particulier. Ce qui exige, bien sûr, de connaître le nom utilisé pour le compte bancaire...

Le Canada a ainsi signé plus de 20 accords édentés. En échange, il a offert un cadeau. Ces paradis fiscaux ont obtenu la non double imposition. Cela signifie qu'une entreprise canadienne peut y installer une filiale, puis rapatrier ses profits au Canada sous forme de dividendes, sans payer d'impôt.

Bref, on s'est donné un bâtonnet inefficace pour lutter contre l'évasion fiscale. Et en échange, on a encouragé l'évitement fiscal des entreprises, devenu tout à fait légal.

Heureusement, la vapeur commence à se renverser grâce à deux initiatives de l'OCDE. Pour lutter contre l'évasion fiscale, l'organisme a lancé une norme pour que les pays s'échangent automatiquement les informations bancaires. Après avoir subi beaucoup de pression, le Canada l'a enfin signée. Il n'y adhérera toutefois qu'à partir de 2018.

Pour lutter contre l'évitement fiscal, l'OCDE a aussi lancé un plan qui forcerait à imposer les profits d'une entreprise dans le pays où elle les réalise. Par exemple, une chaîne de restaurants ne pourrait plus déplacer l'essentiel de ses profits dans un paradis fiscal où elle n'a jamais servi un seul repas.

Le Canada et les autres membres du G20 l'approuvent en principe. Mais comme pour le protocole de Kyoto, c'est l'après-signature qui importe. Ce sera bien sûr complexe. Il faudra s'assurer que les autres pays agissent en même temps, pour ne pas désavantager nos entreprises.

Comment faire ? Il n'est pas trop tard pour savoir ce qu'en pensent les partis.

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