Il y a deux spirales qui s'offrent à l'Afrique, et le temps est limité pour choisir la bonne.

Un nouveau rapport de l'UNICEF prévoit que la population africaine doublera d'ici seulement 35 ans. Selon les projections, en 2100, 40% des Terriens seront africains. Le continent doit saisir ce «dividende démographique».

Une telle spirale se produit quand le nombre de travailleurs augmente plus vite que celui des jeunes et des aînés. Il y a alors beaucoup de main-d'oeuvre disponible, et moins de personnes à la charge de l'État. L'économie se développe. La pauvreté et le taux de natalité diminuent, et plus de femmes travaillent, ce qui en retour accélère encore la croissance économique.

Avec sa croissance économique d'environ 5%, l'Afrique paraît à l'aube du décollage. Pour profiter du dividende démographique, elle aura toutefois besoin de politiques sociales. La solution est connue: contrôler les naissances et éduquer les jeunes filles. C'est ce que prône l'UNICEF, qui réclame à cet égard des mesures «courageuses et strictes».

Malheureusement, le Canada fait le contraire. Lors d'un sommet du G8 en 2010, le premier ministre Harper lançait l'initiative Muskoka pour la santé maternelle et infantile. Depuis, 2,85 milliards de dollars ont été dépensés en aide. Mais moins de 1% ont été consacrés au contrôle des naissances (avortement, contraceptifs, etc.)

Pourtant, la solution devient moins taboue même en Afrique de l'Ouest, dans des pays où moins d'un citoyen sur cinq utilise des contraceptifs. Lancé en 2011, le Partenariat de Ouagadougou a reconnu que la planification familiale devenait inévitable.

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Il y a une autre spirale, qui mène vers le fond. Le nombre élevé de jeunes Africains est un moteur pour la croissance, mais ce combustible peut aussi devenir inflammable.

Si le taux de natalité ne diminue pas, le poids sur le système de santé et d'éducation deviendra difficile à soutenir. L'urbanisation rapide du continent, combinée à un taux élevé de chômage, regrouperait beaucoup de jeunes désillusionnés. Une étude de l'ONU a relevé que les populations jeunes sont les plus susceptibles de faire la guerre. Bien sûr, la relation est complexe et non causale. Mais cela illustre le danger. D'autant plus que la compétition pour l'eau et les autres ressources augmentera dans les prochaines décennies. L'Afrique habite six des 10 pays les plus vulnérables aux changements climatiques, rappelle d'ailleurs l'UNICEF dans son rapport.

Au XVIIIe siècle, le célèbre économiste anglais Thomas Malthus soutenait que la croissance démographique, couplée à la rareté des ressources, menait aux conflits. Heureusement, l'innovation technologique lui donne tort. La Banque mondiale concluait d'ailleurs l'année dernière que l'Afrique disposerait des ressources pour nourrir sa population. Le problème réside dans la pauvreté des fermiers, qui peinent à acheter de l'engrais ou irriguer leurs terres.

Bref, il n'y a pas de fatalité. Il y a seulement une occasion à saisir. Et elle se saisira plus facilement si notre aide se fait sans les oeillères de l'idéologie.

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