Rééquilibrer le rapport de force entre les employés municipaux et les villes est nécessaire. Mais cela ne signifie pas de bafouer les droits des uns pour donner du poids aux autres.

Heureusement, le gouvernement a montré au cours des derniers jours des signes qu'il renoncerait à l'idée d'accorder aux municipalités le pouvoir de décréter les conditions de travail de leurs employés.

Dans l'entente conclue en septembre en vue du renouvellement du pacte fiscal, les municipalités s'étaient résignées à des compressions de 1,2 milliard sur quatre ans. En retour, Québec leur promettait plus d'autonomie et de responsabilités, mais surtout, les municipalités étaient persuadées qu'elles obtiendraient désormais les pleins pouvoirs au regard des relations de travail.

Elles l'ont affirmé comme un fait accompli à plusieurs reprises depuis, sans que le gouvernement les contredise. Le gouvernement entend « remplir cet engagement » et aller « dans la direction » qu'il a indiquée, a ainsi dit le premier ministre Philippe Couillard en février.

Simple malentendu ou réelle volte-face de la part du gouvernement ? Pour l'instant, un certain flou demeure puisque Québec est resté vague quant à ses intentions sur le sujet.

Très clairement, le texte contenu dans l'entente signée en septembre ne va toutefois pas aussi loin que les propos assurés exprimés par certains maires - Denis Coderre et Régis Labeaume en tête - sur la place publique.

Québec a aussi obtenu des avis juridiques démontrant qu'il serait téméraire d'accorder trop de pouvoirs aux villes, notamment sur la question du lock-out. Le gouvernement risquerait d'être débouté en cour au terme d'une longue saga qui ne profiterait à personne. S'acharner à continuer dans cette direction serait une erreur.

Sans compter que le fait d'imposer des conditions de travail doit demeurer un geste exceptionnel. Seul le gouvernement a le pouvoir de décréter une loi spéciale, selon des règles strictes. Sous prétexte de leur donner plus d'autonomie et de responsabilités, veut-on réellement que chacune des quelque 1110 municipalités de la province dispose désormais de ce privilège ?

Il faudra attendre le projet de loi encadrant les relations de travail, promis avant l'ajournement des travaux parlementaires.

Mais l'avenue que semble préconiser le gouvernement, soit de faciliter le processus actuellement très contraignant de conciliation ou d'arbitrage, semble plus raisonnable.

Remettre entre les mains d'un tiers non élu l'issue d'une négociation ne fait pas l'unanimité chez les maires, mais l'idée a le mérite de chercher un compromis acceptable. Une entente négociée vaut toujours mieux que d'imposer ses vues, ce qui provoque alors un climat de travail négatif et démotivant qui s'avère inefficace à la longue.

Reste que les municipalités ont raison quand elles revendiquent une plus grande marge de manoeuvre et Québec devra y répondre avec son projet de loi. Si la majorité des négociations se déroule bien, les dérapages sont généralement à l'avantage des syndicats. Les villes n'ont d'autre choix que de consentir généreusement pour acheter la paix sociale. D'ailleurs, les employés municipaux gagnent 38 % de plus que leurs homologues de la fonction publique et parapublique.

Le résultat n'étonne guère : le contribuable en paie le prix, par une baisse des services ou une hausse de son compte de taxes. Il faut changer cela.