Confronté à bien des soubresauts, le gouvernement Couillard tente clairement un repositionnement depuis quelques mois. Et il semble vouloir le faire sur un terrain longtemps délaissé par les libéraux au profit des autres partis, celui de la fierté québécoise.

Au moment où plusieurs déplorent la vente de Rona et St-Hubert, le premier ministre Philippe Couillard a beaucoup insisté hier, en rencontre éditoriale, sur l'importance de miser sur l'expertise, le savoir-faire et la réputation du Québec.

La relance du Plan Nord et la Stratégie maritime, deux éléments majeurs de la plateforme électorale, sont aujourd'hui pratiquement évacuées du discours économique.

On mise plutôt sur une « nouvelle économie » axée sur l'innovation, qui passe par une implication plus importante des grandes sociétés d'État.

Hydro-Québec, Investissement Québec et la Caisse de dépôt et placement sont une « richesse collective de tous les Québécois », a vanté M. Couillard.

Le plan libéral veut tirer profit de la gloire passée - les barrages hydroélectriques, la construction du métro de Montréal - pour ramener à l'avant-scène la fierté collective qui en émanait et surtout, s'en servir comme levier pour relancer la croissance économique.

Après tout, la renommée de ces institutions est reconnue à l'extérieur du Québec ; la Caisse de dépôt gère en partie le train électrique reliant l'aéroport au centre-ville de Vancouver ; l'expertise d'Hydro-Québec est recherchée à l'international.

Est-ce que ce sera suffisant pour faire oublier que l'objectif principal des libéraux en campagne électorale, cette cible ambitieuse de créer 250 000 emplois en cinq ans, est en voie de ne pas être atteint ?

Chose certaine, une bonne bouffée de fierté pourrait aider à faire oublier toutes les histoires de corruption, de collusion et les allégations en regard des questions éthiques, dont la plus récente, l'affaire Hamad, a monopolisé toute l'attention cette semaine. Et là-dessus, le premier ministre a de nouveau marqué sa distance d'avec le gouvernement libéral précédent. « La façon dont nous faisons les choses n'a rien à voir avec ce qu'on faisait auparavant. »

Reste que de façon générale, le bilan de mi-mandat n'est pas aussi reluisant que l'aurait souhaité M. Couillard. On constate un décalage entre ce qui a été promis et ce qui a été fait. Le trou dans les finances publiques et le pari - réussi - du retour à l'équilibre budgétaire justifient certaines décisions, mais les compressions ont fait mal. Surtout que depuis quelques mois, le gouvernement a bien du mal à faire passer ses « bonnes nouvelles ».

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Évidemment, les regards sont aussi tournés vers l'éducation, une priorité du gouvernement annoncée dans le dernier budget Leitao. Mais ce n'est pas tout de le dire, encore faut-il des mesures concrètes, surtout que le réinvestissement couvre à peine les coupes récentes et n'atteint pas la moyenne de croissance des dépenses des dernières années. On demande encore à être convaincu que les vastes objectifs pour améliorer la réussite scolaire se concrétiseront par des projets et des services dans les classes.

On peut toutefois se réjouir que le milieu de l'éducation - enseignants et parents en tête - ait enfin été entendu. Les liens sont rétablis, affirme même le premier ministre, qui reconnaît que son gouvernement s'est perdu dans les structures, oubliant la réalité des écoles.

Et maintenant ? Le gouvernement Couillard a deux ans devant lui pour corriger le tir. Il veut tourner le dos aux compressions- tout en maintenant une rigueur budgétaire - et sa carte maîtresse pour se rapprocher de la population est clairement de mettre à profit les success stories qui ont marqué l'histoire du Québec.