Le premier ministre Justin Trudeau n'a pas seulement bousculé les conventions, remontant l'allée de Rideau Hall à pied et saluant le public entouré de ses ministres. Même la composition de son Conseil des ministres marque une coupure en se voulant le reflet du Canada d'aujourd'hui.

La parité hommes-femmes est respectée, mais il y a plus. On y trouve diversité culturelle et religieuse, jeunesse et expérience, audace et vécu.

La plus jeune députée, une ancienne réfugiée afghane, a 30 ans à peine ; Ralph Goodale était député dans le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau dans les années 70 ; la ministre de la Justice et Procureure générale du Canada est autochtone ; le ministre de la Défense est de religion sikhe ; la ministre de la Santé a longtemps travaillé en Afrique ; le ministre des Finances ne vient pas du milieu conservateur des banques, mais d'un grand bureau de ressources humaines.

Si la composition d'un cabinet est toujours un exercice fastidieux, on sent qu'une touche de complexité a été ajoutée pour donner une sensibilité à certains ministères.

Quand le ministre des Anciens combattants, Kent Hehr, devenu tétraplégique après avoir reçu une balle dans le cou, rencontrera des militaires blessés revenus du front, on peut penser qu'il fera preuve d'une humanité et d'une compréhension particulières.

Même chose pour la ministre des Affaires autochtones et du Nord, Carolyn Bennett. Sa formation de médecin pourrait bien faire en sorte qu'elle aborde le dossier autochtone en s'attardant aux conditions de vie, parfois dignes du Tiers-Monde, qui affectent la santé des autochtones.

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Des messages ont aussi été envoyés quant à l'importance que le premier ministre accorde à certains dossiers. Jean-Yves Duclos, un candidat poids lourd qui était pressenti dans un portefeuille économique, s'est vu confier le ministère de la Famille, des Enfants et de la Condition sociale. Vu sa spécialisation des enjeux économiques liés à la démographie et les promesses des libéraux envers les familles de la classe moyenne, le signal est important.

Le fait que Justin Trudeau s'occupe lui-même des relations intergouvernementales est également un pari osé, voire risqué, mais un signe indéniable de l'importance qu'accorde le premier ministre à la nécessité de rétablir les ponts avec les provinces.

La cérémonie entourant l'assermentation du nouveau cabinet avait été savamment orchestrée pour donner l'impression d'une grosse bouffée d'oxygène sur Ottawa. De l'image des enfants Trudeau-Grégoire se jetant dans les bras de leurs parents aux badauds saluant leur premier ministre dans une ambiance présidentielle, le portrait d'ensemble marquait clairement le changement de ton.

C'était l'effet recherché et il a été atteint jusque dans la formation du Conseil des ministres. Ceux-ci ont même eu droit à un baptême rapide et inhabituel avec une réunion du conseil dès l'après-midi. Une décision qui témoigne surtout de l'ampleur de la tâche, car les dossiers prioritaires sont nombreux, et le gouvernement doit se mettre à l'action dès maintenant.