Le Québec compte un nombre record de médecins, leur rémunération a été haussée, des groupes de médecine de famille ont été créés, des mesures incitatives ont été ajoutées, mais beaucoup de patients n'ont toujours pas accès à un médecin.

Résultat, les deux tiers des patients qui engorgent les urgences des hôpitaux pourraient être traités dans une clinique. C'est contreproductif et coûteux.

Pendant que les médecins dénoncent «l'approche coercitive, mathématique et méprisante» du ministre Gaétan Barrette et que ce dernier se montre intransigeant, il importe de se rappeler l'objectif du projet de loi 20.

Déjà, en 2005, le Collège des médecins s'inquiétait de la tangente qui se dessinait. Il avait précisé le rôle du médecin de famille: celui d'assurer «la prise en charge et le suivi d'une clientèle déterminée» avant toute autre activité clinique.

Aujourd'hui, le Québec est l'une des provinces où les médecins sont les moins présents dans les cabinets. Ils travaillent principalement à l'hôpital. Les activités médicales particulières, qui les obligent à y travailler 12 heures par semaine, n'y sont pas étrangères. Souvent, ils doivent y consacrer encore plus de temps, sans compter les gardes. Il en reste peu pour faire de la clinique.

Beaucoup de médecins optent d'eux-mêmes pour cette pratique hospitalière, plus diversifiée, où ils se sentent épaulés et n'ont pas à se soucier des tracasseries administratives. Quelque 15% des médecins de famille ont également une pratique ciblée (pédiatrie, gériatrie, médecine sportive) et délaissent la médecine «générale». Tout cela fait en sorte que les malades ont du mal à obtenir un rendez-vous.

Le ministre Barrette n'est pas reconnu pour faire dans la dentelle. Ses propos ont été perçus par les médecins comme du mépris à leur égard, ce qui est loin de favoriser leur adhésion au projet de loi.

Il est toutefois vrai qu'ils travaillent moins qu'avant, ce que reconnaît la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Annuellement, on parle en moyenne de 20 jours de moins qu'au début des années 2000. C'est beaucoup.

Les jeunes - hommes et femmes - veulent une meilleure qualité de vie. L'argument est valable, mais trouvera peu de sympathie dans la population. C'est le souhait de tous les travailleurs, mais la plupart n'ont pas le luxe des médecins qui sont des travailleurs autonomes dont le revenu est garanti.

La profession de médecin vient avec des obligations. Il n'est pas normal que des cliniques ferment à midi le vendredi et que les patients doivent attendre jusqu'au lundi.

Quand un problème perdure, le gouvernement doit parfois forcer la direction à prendre. Le projet de loi 20 a servi d'électrochoc. Le gouvernement et les médecins doivent maintenant trouver des solutions et négocier des conditions acceptables pour atteindre l'objectif: plus d'accessibilité pour les patients. Nous y reviendrons demain.

Demain: des pistes de solutions