Véritable fraude ou simple faille dans le réseau des services de garde? Le phénomène des enfants fantômes, qui occupent virtuellement une place sans bénéficier du service, coûte très cher. Le gouvernement doit y voir.

Des exemples? Un enfant fréquente un service de garde en milieu familial trois jours, mais ses parents signent une fiche attestant qu'il est présent toute la semaine; la responsable reçoit une subvention gouvernementale pour cinq jours de garde. Une mère qui retournera travailler en janvier doit «réserver» sa place dès septembre et Québec verse à la responsable du service de garde une subvention pendant des mois, même si l'enfant reste à la maison; pendant ce temps, la mère touche aussi des prestations dans le cadre du régime d'assurance parentale.

Le Conseil québécois des services de garde éducatifs à l'enfance a sonné l'alarme cette semaine. Il estime que 10% des quelque 15 000 responsables d'un service de garde (RSG) en milieu familial «font une utilisation inappropriée des subventions». C'est une dépense de 15 millions en fonds publics. Reconnaissant la problématique, la ministre de la Famille, Francine Charbonneau, a carrément parlé de «fraude».

Selon ces projections, 8000 places en milieu familial sont ainsi subventionnées sans être occupées. Elles pourraient être offertes à d'autres enfants.

Le phénomène n'épargne pas les centres de la petite enfance et les garderies, mais la façon dont sont allouées les subventions fait en sorte que le milieu familial est davantage touché. Les subventions sont versées en fonction des fiches d'assiduité que les RSG font signer aux parents. Ces derniers n'osent généralement pas se plaindre de possibles inexactitudes, craignant de perdre leur place.

La situation est connue. Le récent rapport du Chantier sur la qualité et la pérennité des services de garde et sur l'optimisation de leur financement (rapport Boisvert) recommande d'ailleurs de «sensibiliser» le milieu familial à cette problématique coûteuse. Il propose aussi certaines solutions, notamment d'instaurer un formulaire d'entente uniformisé entre les parents et les RSG.

Le temps partiel constitue une autre avenue, mais encore trop peu de services de garde offrent de telles places. C'est encore pire en milieu familial. Avec un peu d'efforts et de volonté, il serait pourtant possible de trouver un enfant qui n'a besoin d'une place que deux jours par semaine et ainsi combler le manque à gagner pour les RSG. Pourquoi ne pas implanter des mesures incitatives en ce sens?

Les services de garde subventionnés sont sous la loupe de la commission de la révision des programmes. Avant de procéder à des coupes aveugles qui risqueraient d'amoindrir la qualité des services, il serait temps de s'attaquer aux failles évidentes du système. Non seulement les fonds publics seraient mieux utilisés, mais cela créerait des places pour plus d'enfants.