Malheureusement, les craintes exprimées au début de la commission Ménard, mandatée pour faire la lumière sur les événements du printemps 2012, s'avèrent fondées.

En imputant la responsabilité de la crise au seul gouvernement Charest et en critiquant presque exclusivement le travail des policiers, la commission donne des arguments à ses détracteurs pour glisser le rapport sous le tapis.

Les commissaires devaient identifier les facteurs qui ont contribué à la dégradation du climat social et les impacts des événements du printemps 2012. Ils devaient étudier les techniques d'intervention policière, les méthodes des agitateurs, les impacts économiques et les conséquences des manifestations sur le sentiment de sécurité de la population.

À la lecture des quelque 450 pages du rapport, on ne peut que s'étonner du manque d'équilibre et des prises de position des auteurs. La commission n'avait pas de pouvoir d'enquête. Ceux qu'elle a entendus sont venus de leur propre chef et la majorité était sympathique au mouvement étudiant. Le rapport reprend abondamment leurs propos.

La trame de fond explorée dans le rapport repose sur l'importance du droit de manifester. Les commissaires ont raison d'insister sur cet élément fondamental d'une démocratie, mais oublient de souligner ses responsabilités sous-jacentes.

Sur les techniques policières, la commission s'inquiète à juste titre de l'usage des balles de plastique et des grenades assourdissantes. Elle recommande d'imposer un moratoire pour les premières, tant que leur usage n'est pas mieux encadré, et d'interdire les secondes pour le contrôle des foules.

Elle met aussi en lumière des lacunes inquiétantes dans la préparation des policiers lors de la manifestation à Victoriaville qui s'est soldée par une émeute.

Mais le rapport blâme les policiers pour l'ensemble de leurs interventions : recours au bâton télescopique, gaz lacrymogènes, techniques d'encerclement, arrestations de masse.

Des techniques, souligne le rapport, qui suivent une tendance mondiale. La commission voudrait que le Québec soit celui qui imposera un nouveau modèle d'intervention, mais n'offre aucune proposition.

Le rapport évoque à peine le climat de tension et le chaos qui régnait quotidiennement, particulièrement au centre-ville de Montréal.

Quelles ont été les conséquences des actions de blocage pour les travailleurs ? De balles de billard, des briques et des autres projectiles lancés aux policiers ? Des pièces pyrotechniques qui explosaient au-dessus des foules ? Des manifestants armés de pics ? Des clients attablés aux terrasses soudain prises d'assaut ? Aucune réponse à ces questions.

Quant à l'évaluation des impacts économiques, elle tient sur quelques pages qui sont essentiellement un résumé de ce qui a déjà été rapporté dans les médias.

La commission a raison quand elle dit que le Québec est profondément blessé par les événements du printemps 2012. Malheureusement, ce n'est pas ce rapport biaisé qui va permettre de rétablir les ponts et réfléchir sur l'avenir.