Une fois de plus, les mots «enquête publique» ont été prononcés dans l'enceinte du salon bleu de l'Assemblée nationale.

La reprise des travaux à Québec, hier, a permis à l'opposition de demander pour la énième fois la tenue d'une enquête indépendante sur le milieu de la construction.

 

Il y a maintenant un peu plus de six mois qu'on la réclame, cette fameuse enquête qui ferait la lumière sur les rumeurs de collusion entre les entrepreneurs en construction, les élus et les firmes de génie-conseil. Le gouvernement Charest demeure toujours aussi intraitable.

Pourtant, depuis la fin de la session parlementaire en décembre dernier, d'autres faits sont venus alimenter le dossier déjà fort volumineux des «pro-enquête publique».

Tout d'abord, l'émission Enquête de Radio-Canada a diffusé un reportage sur le travail au noir et la fausse facturation dans le milieu de la construction. Quelques jours plus tard, les enquêteurs de l'escouade Marteau visitaient une poignée d'entrepreneurs parmi lesquels on retrouvait des noms bien connus comme Accurso, Catania et Zambito.

Hier encore, le ministre de la Sécurité publique, Jacques Dupuis, répétait qu'il «n'est pas question de tourner les coins ronds dans le cas des enquêtes policières», faisant référence aux enquêtes menées actuellement par l'escouade Marteau.

Si le gouvernement en place peut afficher une telle assurance, c'est qu'il sent bien que les Québécois ne sont pas prêts à déchirer leur chemise sur la question.

On dira qu'on ne compte plus les nombreuses associations professionnelles qui se sont prononcées en faveur d'une enquête publique au cours des derniers mois, et c'est vrai. De l'Ordre des ingénieurs aux syndicats des professionnels du gouvernement, en passant par l'Association des procureurs de la couronne et l'Association des policiers provinciaux, sans oublier l'ensemble des élus montréalais, presque tout le monde est en faveur d'une enquête publique.

Mais ces appuis ne sont pas suffisants. Il faut que la population en entier réclame la tenue d'une enquête publique pour que la confiance du gouvernement Charest soit ébranlée. Or pour l'instant, les Québécois sont amorphes. La preuve: la pétition que faisait circuler le Parti québécois n'a récolté que 40 000 signatures. Ce n'est pas suffisant pour envoyer un message sans équivoque.

Même désintéressement lorsque le mouvement citoyen Zéro corruption a organisé une marche pour exiger la tenue d'une enquête: seulement 200 personnes se sont présentées. D'accord, le mercure indiquait -1000 degrés ce jour-là, mais aux yeux du gouvernement, il est clair que la population n'est pas prête à sortir dans la rue sur cette question-là.

Bref, si les Québécois souhaitent vraiment la tenue d'une enquête publique, ils vont devoir sortir de leur torpeur. Pour l'instant, leur attitude conforte le gouvernement dans ses positions. S'il n'y a pas d'enquête, ils n'auront qu'eux-mêmes à blâmer.

nathalie.collard@lapresse.ca