On apprenait vendredi dernier que les travaux de réfection du boulevard Saint-Laurent, terminés en 2008, coûteront finalement plus cher que prévu. La Ville de Montréal doit en effet verser 800 000$ supplémentaires au promoteur Frank Catania, à qui on avait demandé d'accélérer la cadence pour terminer les travaux en 13 mois plutôt que 22.

Ce n'est pas tout: un autre montant de 2 millions pourrait être réclamé par le même entrepreneur car, dit-il, ses profits ont été revus à la baisse à la suite de la réduction des délais. Sa requête est actuellement sous examen.

Jusqu'ici, il en a coûté 32 millions pour refaire une beauté à ce tronçon de rue de 2,5 kilomètres. Le résultat final: trottoirs plus larges, chaussée refaite, nouveaux arbres ainsi que des nouveaux fils et des nouveaux tuyaux au sous-sol.

On se souviendra que les commerçants du boulevard étaient à bout de nerfs durant les travaux. Ils craignaient de ne jamais être en mesure de récupérer leur clientèle. Ils avaient vu juste. La faute aux travaux ou à l'économie? En effet, la crise a assené un coup terrible aux commerces de la Main, qui a pourtant déjà été source de fierté et de reconnaissance à l'étranger.

Or il suffit d'aller s'y balader aujourd'hui pour constater à quel point cette époque dorée n'est plus qu'un lointain souvenir.

Espaces à louer, locaux abandonnés, malpropreté...Il règne une atmosphère de ville en déconfiture. Les locaux de l'ancien Shed Café seront occupés par un pub irlandais membre d'une chaîne. L'immense surface d'American Apparel est vide depuis plusieurs mois. La boutique Dex, l'ancien Sofia, les locaux du Pistol attendent également qu'un locataire leur redonne vie. Et que dire du coin avenue des Pins, boulevard Saint-Laurent? L'édifice qui abritait un resto de falafels est décrépi et envahi par les pigeons.

Sans compter que l'ex-Centris n'attire plus les cinéphiles qui allaient manger une bouchée ou boire un verre avant ou après le film. Triste à mourir.

Il y a bien quelques irréductibles comme la boutique Scandale de George Lévesque, la librairie Gallimard ou le restaurant Buena Notte, mais on parle tout de même d'un taux d'inoccupation avoisinant les 8%.

Personne n'aurait pu éviter les effets de la crise (on observe d'ailleurs une situation semblable rue Sainte-Catherine), mais on peut se demander si la Ville de Montréal a offert suffisamment de soutien aux commerçants après les travaux de réfection. À l'automne 2008, la Ville, l'arrondissement et la Société de développement commercial avaient promis un plan de relance de plusieurs millions de dollars. Vérification faite, Montréal a accordé une subvention de 50 000$ et Gaz Métro (qui avait dû rouvrir la chaussée une fois les travaux terminés) aussi. Au total, c'est donc 100 000$ qui ont été investis pour relancer la Main. Visiblement, ce n'était pas suffisant.

La nouvelle administration de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal, composée à 100 % de membres de Projet Montréal, est consciente de la situation. Le maire Luc Ferrandez assure que la question se retrouvera au programme cette année. Selon lui, il ne s'agit pas uniquement d'une question de marketing. Il songe à des mesures d'apaisement de la circulation automobile, au verdissement, etc. Une chose est sûre, il faut une vision et vite. La Main est en train de mourir...