On n'a pas sablé le champagne à l'hôtel de ville de Montréal, mardi. Normal. La nomination de Laurent Lessard à la tête du ministère des Affaires municipales est peut-être bien accueillie dans les petites municipalités du Québec, mais dans la métropole, qui a déjà la désagréable impression d'être mal aimée dans la capitale, l'arrivée de M. Lessard laisse plutôt tiède.

Bien sûr, il ne faut pas présumer de l'avenir, mais cette nomination indique tout de même que le gouvernement Charest a l'intention de poursuivre dans le sillage de Nathalie Normandeau, une autre ministre des Affaires municipales issue des régions, plutôt insensible à ce qui se passait à Montréal.

 

Malgré ses relations cordiales avec le maire Gérald Tremblay, Mme Normandeau n'a jamais montré d'affection particulière à l'endroit de la métropole. Vrai, c'est sous sa direction que le gouvernement Charest a adopté la loi 22 qui accorde le statut de métropole à Montréal, mais cette loi aurait été adoptée de toute façon. Quant aux déclarations récentes de la ministre en réaction aux nombreux scandales qui ont ébranlé l'administration municipale, elles étaient fades et trahissaient une indifférence certaine à ce qui se passe à Montréal.

Son successeur a été maire de Thetford Mines durant quatre ans, de 1999 à 2003. S'il connaît le monde municipal, c'est d'un point de vue de ville régionale, très éloignée des réalités urbaines et multiculturelles de Montréal. À ce sujet, M. Lessard aura sans doute des points communs avec le ministre responsable de la région montréalaise au sein du gouvernement Harper, Christian Paradis, lui aussi originaire de Thetford Mines.

Chose certaine, M. Lessard aura du pain sur la planche cette année. Non seulement y aura-t-il des élections le 1er novembre prochain mais, en outre, la pression est forte, dans le monde municipal, pour qu'on revoie la fiscalité des villes à qui on demande de plus en plus, sans augmenter leurs ressources financières.

On dit de M. Lessard qu'«il n'a pas la langue dans sa poche», une qualité en cette époque où règne la langue de bois. Cela dit, son passage à l'Agriculture ne s'est pas fait sans heurts et sa gestion de la crise de la listériose, plutôt brutale, lui a même valu un blâme de la protectrice du citoyen. Il lui faudra pourtant du tact et du doigté pour gérer ce qui s'en vient, soit les conclusions du rapport de l'enquête du vérificateur général sur l'attribution du contrat des compteurs d'eau ainsi que les enquêtes policières sur la SHDM et les compteurs d'eau. La question de l'éthique dans le monde municipal, et pas seulement à Montréal, est également à inscrire à son agenda. Sans compter le problème de la gouvernance, ramené sur le tapis par la candidate Louise Harel.

Bref, même si le ministre des Affaires est le ministre de toutes les villes du Québec, et pas seulement celui de Montréal, il est certain que les destinées et les problèmes de la métropole devraient l'occuper durant le début de son mandat.

C'est pourquoi le choix d'un ministre reconnu pour ses affinités pour Montréal, pour sa connaissance fine des enjeux de la métropole, aurait été plus réjouissante. Laurent Lessard saura-t-il défendre les intérêts de la métropole au sein du cabinet? Espérons.