Le quartier Pointe-Saint-Charles va-t-il enfin renaître? Il est permis de l'espérer à la lecture du rapport de l'Office de consultation publique, dévoilé la semaine dernière. Ce document est le fruit d'une démarche originale, une première à Montréal: plutôt que de se prononcer sur un projet d'aménagement précis, l'Office a animé et encadré une série de rencontres réunissant les élus, les groupes communautaires, les promoteurs et les résidants. L'objectif: s'entendre sur un éventuel projet de développement du site des ateliers du Canadien National.

Le territoire dont il est question couvre le quart de Pointe-Saint-Charles et doit accueillir le centre d'entretien de l'Agence métropolitaine de transport. Le reste du terrain serait partagé entre des activités industrielles et un développement résidentiel. Rappelons qu'il s'agit d'un coin quasi abandonné, dont le développement accuse plusieurs décennies de retard. L'avortement du projet de déménagement du casino lui a valu en outre une réputation de quartier difficile. Le spectre de la contestation citoyenne a sans doute fait peur à bien des promoteurs. Bref, on peut presque parler d'un secteur maudit qui aurait besoin d'un sérieux coup de baguette magique.

 

Or, le rapport de l'Office de consultation publique montre qu'en encadrant bien les discussions à propos du développement, le quartier pourrait se doter d'un projet emballant.

À condition, précisent les auteurs, d'adopter une réglementation très stricte qui garantira un développement harmonieux, respectueux des conditions de vie des résidants du quartier.

Pour l'instant, ces résidants sont inquiets. Ils craignent la circulation des camions qui sera inévitablement générée par une activité industrielle. Ils s'inquiètent aussi du degré de contamination du sol et du manque de logements abordables dans les projets préliminaires du promoteur. Bref, comme tout le monde, ils aspirent à une certaine qualité de vie.

Leurs craintes sont accentuées par l'attitude du propriétaire des terrains en question, Vincent Chiara du Groupe Mach, qui a commis plusieurs entorses aux règlements actuels, et ce, pendant le processus de consultation, ce qui a passablement fragilisé le lien de confiance avec les résidants.

Pour éviter ce genre de dérapages, l'Office recommande donc à la Ville de faire preuve de rigueur en adoptant une réglementation stricte (architecture, urbanisme, circulation des camions) qui encadrera le développement futur du site des ateliers du CN. L'Office insiste aussi sur l'importance d'adopter des mesures dissuasives. Les amendes en vigueur (quelques centaines de dollars lorsqu'on ne respecte pas un règlement concernant par exemple la circulation de camions en milieu résidentiel durant la fin de semaine), ne sont pas suffisantes pour imposer le respect. Il faut davantage de poigne.

Les prochaines années seront décisives pour le sud-ouest de Montréal. Entre la réfection de l'échangeur Turcot à l'ouest et l'abaissement de l'autoroute Bonaventure à l'est, un avenir prometteur attend cette portion de la ville, qui recèle un potentiel incroyable grâce à son patrimoine architectural, son passé industriel et la présence du très beau canal de Lachine.

Cette transformation extrême n'est pas seulement nécessaire, elle est vitale. C'est pourquoi tous les intervenants, autant les élus que les groupes communautaires et les promoteurs, ont l'obligation morale de s'entendre dans ce dossier.