Parmi tous les développements qui ont attiré l'attention sur la scène internationale en 2013, le plus significatif est passé un peu inaperçu. Il s'agit du progrès qu'ont fait les États-Unis dans leur quête de l'indépendance pétrolière vis-à-vis les pétromonarchies du Moyen-Orient. Cet objectif a été celui de tous les présidents américains depuis Richard Nixon.

Or, que trouve-t-on de nouveau dans le sous-sol américain qui produise cet effet? Le pétrole et le gaz de schiste, bien sûr.

Ainsi alimentés, les États-Unis pourraient être en 2016 les premiers producteurs mondiaux de pétrole, devant l'Arabie saoudite et la Russie. Cette manne, combinée au pétrole importé du Canada (24% de l'approvisionnement américain), à un accès plus grand à l'or noir mexicain et à une hausse de la production au Brésil, mène à l'autarcie continentale et aura de nombreuses répercussions.

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Des répercussions sur l'environnement, par exemple, même si l'extraction des hydrocarbures de schiste entretient de vigoureux débats. Les réserves de gaz de schiste étant immenses aux États-Unis, contrairement au pétrole de même source (exploitation prévue : sept ans), le rôle du gaz dans la production d'électricité (35% en 2040) supplantera celui du charbon, avec les bénéfices qui s'y rattachent en termes d'émissions de CO2.

Mais la plus importante retombée se trouve ailleurs. Le quotidien Le Monde la résume assez bien : « C'est dans le sous-sol américain que se construit le nouvel équilibre géopolitique du monde ».

De pair avec l'instabilité provoquée par les Printemps arabes et l'augmentation de la demande asiatique en hydrocarbures, la « révolution dans l'approvisionnement nord-américain », selon l'expression de l'Agence internationale de l'énergie, modifie non seulement la carte de l'énergie, mais celle de la politique.

La situation remet en cause, du moins en partie, l'obligation que se sont donnée les États-Unis de maintenir la stabilité au Moyen-Orient en poliçant les couloirs maritimes et, de façon générale, en faisant office de gendarme. Or, ce retrait possible est vu comme une menace par plusieurs nations. Au premier chef par l'Arabie saoudite, déjà bousculée par le rapprochement entre Téhéran et Washington ainsi que la rivalité régionale croissante entre les influences chiite et sunnite.

Se joint encore à cela le peu de goût qu'a la population américaine - après l'Afghanistan, l'Irak, la Libye - pour ce rôle de gendarme. Ainsi que l'extrême prudence de Barack Obama en matière d'aventures militaires, comme on l'a vu dans le dossier syrien.

Quant à la Chine, qui consomme de plus en plus goulûment le pétrole du Golfe, est-elle prête à prendre la relève? Certainement pas dans l'immédiat, ne serait-ce que parce qu'elle ne possède qu'un seul porte-avions, remarquent les stratèges.

Ce sera intéressant à suivre au cours de l'année qui vient.