Sans doute l'image iconique de l'action policière lors des manifestations étudiantes demeurera-t-elle celle de la désormais célèbre constable 728, que 495 000 personnes ont vue sur YouTube en train d'asperger de gaz poivre un petit groupe de manifestants.

Acte de brutalité?

C'est certainement ce que croient les 131 professeurs et chargés de cour qui réclament une enquête publique sur la conduite des forces policières lors des événements du printemps. À cette occasion, «nous avons été témoins de la plus grande vague de répression policière de l'histoire du Québec», explique au quotidien Le Devoir Francis Dupuis-Déri, initiateur de la requête. Celui-ci est professeur à l'UQAM et auteur, entre autres, de Les Black Blocs: La liberté et l'égalité se manifestent.

Samedi dernier, alors que la traditionnelle manifestation du 22 du mois tournait à la violence, la députée de Gouin et coleader de Québec solidaire, Françoise David, a donné son appui à la revendication des 131 enseignants.

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Certes, cette démarche pétitionnaire soulève peu d'intérêt au sein du public. Néanmoins, le caractère exceptionnel des événements du printemps (nombre de manifestations, violence répétée, bouclage de collèges et d'universités, défaite de l'État) justifie qu'on se penche sur l'idée proposée.

Le document, donc, dresse une liste d'interrogations sur le travail des policiers - présumés répressifs et brutaux. Or, s'il devait y avoir enquête, elle devrait en toute logique porter sur tous les aspects des événements.

Pour s'en tenir au dossier de la police: les quarts de travail imposés aux policiers (sur plus de 130 soirs consécutifs!) étaient-ils déraisonnables? À la longue, les ont-ils rendus, sous l'effet de l'exposition répétée aux insultes, aux provocations et aux projectiles, plus vulnérables à l'erreur?

Et encore: pourquoi, à Montréal, n'a-t-on pas fait respecter le règlement municipal, adopté le 17 mai, sur la divulgation de l'itinéraire des manifestations et le port du masque? Pourquoi semble-t-il si difficile de mettre la main au collet des casseurs, que l'on présume assez peu nombreux, prévisibles, repérables par diverses techniques d'enquête?

Sous un autre angle: a-t-on exercé une surveillance suffisamment serrée de l'internet afin d'y repérer les incitations directes à la violence et au crime, ou même les menaces de mort? A-t-on tenté de savoir si les étudiants se voyaient en quelque endroit soumis, non pas à une propagande néo-marxiste, ce qui est légal, mais à des prêches appelant à la violence, ce qui ne l'est pas?

Et encore tout cela ne fait-il pas le tour du sujet. Il y aurait aussi des questions à poser sur les positions adoptées par les cégeps et universités. Sur le rôle des centrales syndicales dans le conflit. Sur les coulisses des associations étudiantes...

Une enquête publique, donc? Si une enquête était annoncée, pas une mascarade, mais une vraie de vraie, globale et en profondeur, il n'est pas certain qu'il s'en trouverait beaucoup pour la vouloir encore.