Tenant un congrès historique dans la foulée d'une «victoire» électorale qui l'a été tout autant, le Nouveau Parti démocratique a résisté avec peine à la tentation de se déchirer autour du mot «socialisme». Lequel, il est vrai, sent bon la soupe prolétaire, la fleur citoyenne et le mitterrandisme classique!

Tenant un congrès historique dans la foulée d'une «victoire» électorale qui l'a été tout autant, le Nouveau Parti démocratique a résisté avec peine à la tentation de se déchirer autour du mot «socialisme». Lequel, il est vrai, sent bon la soupe prolétaire, la fleur citoyenne et le mitterrandisme classique!

Seulement, dès lors que les néo-démocrates occupent 103 sièges (dont 59 du Québec) aux Communes et constituent l'opposition officielle, ne serait-il pas préférable de le cacher, ce mot-épouvantail? De fait, c'est précisément ce qu'on a choisi de faire. Officieusement, bien sûr, en mettant la patate chaude à refroidir jusqu'au prochain congrès, dans deux ans. À ce moment-là, on verra...

Pour l'heure, la constitution du parti demeure donc axée sur des principes «socialistes démocratiques» et non «sociaux-démocrates», comme une résolution le proposait.

* * *

Est-ce grave, docteur?

Le chef Jack Layton concède que des militants de son parti accordent une grande importance à l'étiquette originelle du NPD, mais que ce n'est pas son cas. Et, de fait, le mot en S agit comme une ligne directe chargée d'un fort courant d'émotion avec le fantôme de Tommy Douglas, le fondateur, l'icône, menacé ainsi aux yeux de certains de haute trahison sémantique! Sous cet angle, l'affaire est donc grave pour les purs et durs de la gauche canadienne. Lesquels, en cette occasion, rappellent vaguement les «caribous» du Parti québécois (vous vous souvenez?), agrippés à de vieilles reliques alors que le précipice guette!

L'affaire est sérieuse d'un autre point de vue encore. On connaît la fascination de la gauche, de toutes les gauches, pour les mots. Elle a toujours été sans limites. Justement, on n'a qu'à penser aux péquisteries de la belle époque, celle des congrès en forme de fastidieux conclaves. Ou aux groupuscules des années 70, savants exégètes de la virgule ouvrière...

Or, un NPD désormais admis dans la cour des grands ne peut plus se permettre de brasser ainsi du vent. De faire de l'art pour l'art.

Si le «socialisme» dont on parle ici est bien celui du dictionnaire, avec étatisation à gogo et tout le fourbi, on n'en trouve plus nulle part d'échantillons - sauf au rayon des farces et attrapes de l'Histoire ainsi qu'au département Sciences Po de toute bonne université. Il faut que le NPD en prenne acte et fasse comme les travaillistes britanniques l'ont fait il y a près de 20 ans: congédier le vocable et passer à autre chose.

Il est même dommage qu'on ne l'ait pas fait immédiatement, de façon claire et définitive. Ça aurait été tout bénéfice: admirablement franc, électoralement rentable.

Et ça aurait eu du panache.