À quelques heures de l'ouverture du Forum économique mondial de Davos, demain, deux faits irréfutables campent bien l'atmosphère qui prévaudra dans la commune suisse envahie par 2500 riches et puissants de ce monde.

À quelques heures de l'ouverture du Forum économique mondial de Davos, demain, deux faits irréfutables campent bien l'atmosphère qui prévaudra dans la commune suisse envahie par 2500 riches et puissants de ce monde.

D'abord, le président russe, Dmitri Medvedev, a ajourné son départ pour Davos après l'attentat survenu, hier, à Moscou. Voilà comment il faut désormais composer sans relâche avec le phénomène de la terreur qui est l'un des traits distinctifs de l'époque.

Ensuite, les délégations chinoise et indienne seront de quatre à cinq fois plus considérables qu'il y a 10 ans, alors que les Américains seront probablement moins nombreux, gênés par l'échec: la crise, le chômage, une reprise qui «reprend» peu...

Difficile de mieux illustrer la montée de l'Asie couplée au relatif déclin, non seulement de l'Amérique, mais de l'Occident. Sinon en relevant que, pour la première fois en 2009, les actifs des riches Asiatiques (9700 milliards $US) ont surpassé ceux des Européens nantis! Au surplus, on connaît les tourments vécus dans le sud de l'Europe, en France, en Grande-Bretagne, en Islande, ailleurs encore: États au bord de la faillite, chômage endémique, retraites charcutées, fiscalité de plus en plus confiscatoire, aides d'urgence accordées sur le mode panique, etc.

Comment, après tout cela, être rassuré?

C'est un signe des temps que, à la veille du sommet, l'hebdomadaire britannique The Economist ait choisi de décortiquer les chiffres, non de la productivité ou de la profitabilité, mais bien des inégalités de revenus entre individus et entre nations. Il est vrai que, consultées à ce sujet, les «huiles» de Davos estiment aussi que ce problème sera l'un des plus importants au cours de la décennie à venir.

Ainsi, il appert que la montée des inégalités à l'intérieur de chaque nation depuis les années 80 est réelle et presque universelle. C'est en Chine que cette ascension a été la plus brutale, bien davantage qu'aux États-Unis. Or, ce triste record coïncide pourtant avec le fait que 300 millions de Chinois sont sortis de la misère depuis 15 ans, un grand bond en avant (sic) inédit dans l'Histoire! Tout aussi étonnant: les inégalités entre nations ont décru au cours de la même période*.

Cependant, l'inégalité n'est peut-être pas surtout une affaire de chiffres. Matériellement supportable, elle peut psychologiquement ne pas l'être. Et elle sera souvent plus durement ressentie dans les sociétés les moins miséreuses.

À Davos, il faudra s'en préoccuper. Sans toutefois perdre de vue que la pauvreté (et, a fortiori, l'extrême pauvreté), qui n'a rien de psychologique, demeure le fléau à combattre en priorité.

* La mesure utilisée est le coefficient de Gini, qui va de zéro (l'égalité absolue) à un (l'inégalité absolue). Ce coefficient à l'échelle globale a chuté de 0,66 à 0,61 depuis les années 80.