Pourquoi, lorsqu'il est question de dépenses publiques contestables ou contestées, évoque-t-on immanquablement la nouvelle salle de l'Orchestre symphonique de Montréal? Pourquoi pas le toit du Stade olympique, qu'il faut encore rafistoler à coup de centaines de millions... pour abriter quoi, au juste? Ou l'hôpital universitaire encore rigoureusement inexistant, dont les coûts augmentent malgré cela à un rythme vertigineux? Ou encore... (insérez ici votre bacchanale étatique préférée)?

Pourquoi, lorsqu'il est question de dépenses publiques contestables ou contestées, évoque-t-on immanquablement la nouvelle salle de l'Orchestre symphonique de Montréal? Pourquoi pas le toit du Stade olympique, qu'il faut encore rafistoler à coup de centaines de millions... pour abriter quoi, au juste? Ou l'hôpital universitaire encore rigoureusement inexistant, dont les coûts augmentent malgré cela à un rythme vertigineux? Ou encore... (insérez ici votre bacchanale étatique préférée)?

Mais non.

Dans le débat sur un éventuel amphithéâtre sportif à Québec, c'est la salle de l'OSM, rien d'autre, qui sert d'épouvantail. Même le maire de Québec, Régis Labeaume, a eu recours à l'argument.

Il s'agit au fond de la nouvelle bataille engagée dans le cadre d'une vieille guerre. Pas la guerre Montréal-Québec, mais celle des cultures, la petite et la grande. Le hockey est présenté comme un élément mineur de la première. L'OSM endosse malgré lui une représentation caricaturale de la seconde: celle d'une culture bourgeoise qui suce le sang d'un prolétariat qui ne la fréquente pas.

Or, c'est injuste pour l'OSM. Pour la musique. Et pour le hockey.

* * *

De toutes les institutions culturelles québécoises, l'Orchestre symphonique de Montréal est une des mieux enracinées, conduites, résilientes, imaginatives et couronnées de succès. En un mot, l'OSM donne toujours son 110 pour cent.

D'autre part, parmi les différentes disciplines artistiques accréditées par les élites, la musique est certainement celle qui fait le moins de... crises du bacon existentielles.

On ne verra jamais un musicien chasser son public de la salle en l'abîmant d'injures; ou en lui ordonnant de se taire et de payer; ou en le traitant de demeuré incapable de se hisser à la hauteur de sa hauteur; ou en le tartinant d'une confiture de mots dont l'hermétisme le dispute à la vacuité... toutes choses si courantes dans certains univers artistiques qu'elles sont parvenues à rendre souvent détestable la culture culturelle.

Or, la musique, elle, joint tout doucement, sans faire d'éclats, des couches étonnamment larges et hétéroclites de la population.

Dans nul autre domaine ne serait possible une entreprise de partage de l'amour de l'art aussi brillante que celle que mène depuis des années Edgar Fruitier (ses coffrets de musique choisie se sont vendus à plus de 225 000 exemplaires ; son concert théâtral, Edgar et ses fantômes, actuellement à l'affiche, est un grand succès populaire). Et peu d'institutions culturelles autres que l'OSM sont capables d'efforts aussi soutenus pour étendre leur auditoire, l'orchestre y parvenant à un point étonnant, comme on l'a vu encore une fois lors du concert extérieur donné, il y a 15 jours, en plein centre-ville.

Quant à Kent Nagano, déjà intime avec le hockey dont il a célébré la grandeur, il serait le chef tout indiqué pour diriger le concert d'ouverture d'un nouvel amphithéâtre à l'autre bout de la route 20...