Que dire aux enfants? Sur les bancs d'école, quelles connaissances -pardon: compétences...- les enseignants doivent-il inculquer à leurs élèves sur le sexe, la foi, l'environnement, le contentieux canado-québécois? Et sur les parcs nationaux?    

Ce thème, celui des parcs, est apparemment tout aussi miné que les autres depuis que Stephen Harper a fait parvenir aux élèves du pays une invitation à aller jouer dans les parcs nationaux et autres lieux historiques canadiens.

Propagande fédéraliste et crime de lèse-compétence, a aussitôt protesté le Bloc québécois, insensible à l'argument voulant qu'il s'agissait de marquer le 100e anniversaire de Parcs Canada. Cependant, parlant de propagande, nous rappellerons -avec quelque perfidie, nous l'avouons...- que le cahier pédagogique Parlons de souveraineté à l'école présenté aux enseignants en 2006 ne faisait pas dans la dentelle, lui non plus. Souvenez-vous. «Activité numéro 31. Question pour alimenter la discussion. Au lendemain de l'indépendance, pourrez-vous visiter les Rocheuses?»

La réponse est: oui.

Et vous pourrez même jouer dans l'un ou l'autre des trois parcs nationaux qui y sont aménagés.

Ces escarmouches dignes d'une classe de maternelle n'en découlent pas moins d'une problématique fondamentale: l'école est en effet le lieu où, pour ainsi dire, s'exerce le pouvoir sur l'avenir.

On y transmet le récit fondateur (le mot anglais narrative est encore plus exact), le cadre moral et le «mode d'emploi» d'une société. Aussi, y laisser circuler le moins possible de sollicitations commerciales ou idéologiques, de fabulations ésotériques ou de mensonges bien carrés, est littéralement un devoir national.

Or, sans remonter jusqu'à Charlemagne, on notera par exemple que les bouleversements sociopolitiques ont toujours entraîné des révisions des «vérités» et des «faits» enseignés à l'école. En France, on ne cesse de se plaindre d'un corps professoral porté à gauche et qui, de ce fait, dispenserait un enseignement biaisé. Aux États-Unis, les tentatives répétées de faire entrer dans les écoles la thèse créationniste -ou sa version soft, le design intelligent- alimentent l'un des plus lourds débats nationaux. Au Québec, parler d'éducation sexuelle, d'enseignement religieux ou parareligieux, de sensibilisation à l'environnement à l'école, soulève immanquablement la polémique.

Bref, faire la part des choses n'est pas simple.

Cependant, lorsque l'enseignement dérape, tout parent en verra des signes probants dans le discours que son enfant rapporte de ses classes.

À 7 ou 8 ans, un bambin n'a pas par lui-même d'opinion arrêtée sur Stephen Harper; si, autour de la table familiale, il se met à le louanger avec verve, c'est qu'on lui aura mis les mots dans la bouche. Il n'a pas non plus d'opinion vraiment personnelle sur l'environnement; s'il menace de dénoncer ses parents insuffisamment verts à David Suzuki, c'est qu'on lui aura fait apprendre par coeur le nouveau petit catéchisme.

Le truc de la rentrée, donc: se tenir au courant de ce qui se raconte à l'école et faire contrepoids si on le juge approprié. Sans dénigrer l'école ou l'enseignant, bien sûr. Mais en faisant comprendre à l'enfant que, en certaines matières, il doit connaître différentes facettes d'une réalité afin de se faire un jour une opinion vraiment personnelle et suffisamment éclairée.

Ça peut être fastidieux. Mais assez comique, aussi, à l'occasion.