Henning Mankell, 62 ans, est un écrivain suédois à succès, qui fait dans le polar. Il comptait parmi les 682 passagers des six navires composant la désormais célèbre flottille interceptée par Israël. Et s'il est très engagé dans la cause palestinienne, il nierait (sûrement avec raison) avoir des accointances islamistes ou cultiver des préjugés antisémites. En fait, il projette l'image du militant occidental propalestinien standard, convaincu de sa bonne foi, fier de se sacrifier pour la justice et la paix.

Henning Mankell, 62 ans, est un écrivain suédois à succès, qui fait dans le polar. Il comptait parmi les 682 passagers des six navires composant la désormais célèbre flottille interceptée par Israël. Et s'il est très engagé dans la cause palestinienne, il nierait (sûrement avec raison) avoir des accointances islamistes ou cultiver des préjugés antisémites. En fait, il projette l'image du militant occidental propalestinien standard, convaincu de sa bonne foi, fier de se sacrifier pour la justice et la paix.

De plus, Henning Mankell a la solution au conflit israélo-palestinien. Il l'a exposée, il y a un an, dans le quotidien suédois Aftonbladet.

«L'État d'Israël n'a aucun avenir dans sa forme actuelle», a-t-il expliqué. «Plus encore, ceux qui prônent la solution des deux États ont tout faux. La question est de savoir s'il sera possible de faire entendre raison aux Israéliens afin qu'ils acceptent volontairement de renoncer à leur État où règne l'apartheid. Ou s'il faudra le leur imposer contre leur volonté...»

En somme, il s'agit d'un plan simple: éliminer Israël, quelle que soit la méthode.

Qu'une telle position soit soutenue par un littérateur suédois ordinaire, mainstream, sans doute honnête homme, suffirait à démontrer que, dans l'opinion publique occidentale, la cause israélienne est perdue. Or, ce conflit est typique de la guerre asymétrique du XXIe siècle dont l'issue se décide, non par les armes, mais par l'opinion.

Ainsi, la cuisante défaite d'Israël dans l'affaire de la flottille dite humanitaire était escomptée. «Nous serions heureux s'ils nous arrêtaient par la force, nous voulons montrer la brutalité du régime sioniste», avait clairement annoncé Bulent Yildirim, président de la fondation islamiste turque qui a assemblé l'armada. Aujourd'hui, il admet volontiers que des soldats israéliens ont été battus et délestés de leurs armes, ne niant pas que celles-ci aient pu ensuite être utilisées...

Mais ce n'est pas le premier échec retentissant d'Israël. Les dernières incursions au Liban et dans la bande de Gaza ainsi que le blocus imposé aux Gazaouis sont aussi des aveux d'impuissance. Et pour comble, Tsahal et le Mossad ne sont plus ce qu'ils étaient - ah! les Six Jours ! et Entebbe! Ils accumulent les erreurs, fatigués peut-être, ou démoralisés.

Israël s'entête pourtant dans une répugnante stratégie de force brute, presque suicidaire. Ainsi, d'insoluble qu'il était, le conflit est en outre devenu ingérable. Israël doit donc lâcher du lest, au sujet de Gaza, au sujet des colonies, par pragmatisme autant que par humanité. Certes, c'est dangereux. Et ça ne lui rapportera strictement rien auprès de l'opinion publique occidentale : jamais, en effet, un seul des innombrables Henning Mankell de ce monde ne changera d'idée, quoi que fasse l'État hébreu.

Mais le conflit redeviendra peut-être gérable, ce qui est pour l'instant le maximum qu'on puisse espérer.