Pendant les quatre ans, ou peut-être les huit, que Barack Obama va passer à la Maison-Blanche, la longue crise iranienne - 30 ans! - devra être résolue. Sinon, on pourrait assister à une escalade nucléaire d'une ampleur sans précédent, et ce, dans une région du monde dont la stabilité n'est pas la première caractéristique.

C'est en partie, mais en partie seulement, un autre legs de George W. Bush, dont l'obsession irakienne et la vision en deux dimensions lui auront fait négliger les vrais enjeux mobilisant le monde arabe et/ou musulman. C'est-à-dire le conflit israélo-palestinien, bien sûr; ainsi que la guerre sourde pour l'hégémonie régionale, dont l'Iran est le tout premier acteur.

 

Qu'elle se matérialise ou pas, en effet, la «bombe iranienne» est déjà devenue l'objet déterminant dans ce jeu d'équilibre évolutif auquel s'adonnent Perses et Arabes. Sans parler des Israéliens, qui ont déjà bloqué l'accès de l'Irak à l'atome en bombardant le réacteur Osirak, alors presque achevé (1981).

On connaît le ton, plus conciliant, qu'emploie le nouveau président des États-Unis dans les rapports qu'il entame avec Téhéran. Mais il lui sera lourdement rappelé que le danger présenté par l'atome iranien, lui, devient chaque jour plus pressant.

Le régime des ayatollahs professe qu'il ne désire se doter que du nucléaire civil. Mais les faits bruts sont alarmants. Dans six mois, les centrifugeuses perses auront produit 1500 kg d'uranium faiblement enrichi (on en serait aujourd'hui à 1000), ce qui sera suffisant pour fabriquer une bombe après un nouveau cycle d'enrichissement. Parallèlement, l'Iran perfectionne des missiles capables de livrer l'engin à des distances toujours plus grandes.

En général, un plus un égale deux.

Or, depuis que l'Iran a dévoilé ses intentions nucléaires, il y a cinq ans, une dizaine de pays du Moyen-Orient ont annoncé qu'ils allaient eux aussi entrer dans la course. Entre autres, deux États qui revendiquent une position dominante dans la région, l'Arabie Saoudite et l'Égypte, négocient ou ont déjà conclu des ententes sur des technologies nucléaires avec les États-Unis ou la France (l'Allemagne et la Chine offrent aussi la marchandise).

Il est toujours question de nucléaire civil, bien entendu... et le fait est que, selon l'ONU, le parc atomique mondial devra s'élargir de 32 réacteurs par année au cours des quatre prochaines décennies afin de combler les besoins en énergie tout en combattant les gaz à effet de serre.

Mais la cloison n'est pas étanche entre nucléaire civil et militaire.

De sorte que, devant cette inévitable prolifération, il faudra inventer un nouveau «grand contrat nucléaire». Ce sont les mots qu'emploie le premier ministre britannique, Gordon Brown, qui prône l'ouverture internationale de l'accès aux matières fissiles, assortie de contrôles plus serrés et de sanctions plus fortes en cas de délinquance.

En ce sens, l'Iran va servir de test.

Même si personne n'ose évoquer ce que serait le plan B si Téhéran l'échouait.

mroy@lapresse.ca