Au cours des quatre années qui viennent, quel sera le «cygne noir» de Barack Obama? Et où atterrira-t-il? Par définition, il s'agit d'une bête imprévisible. C'est celle décrite par Nassim Nicholas Taleb, philosophe, mathématicien et analyste financier libano-américain dans son essai tout juste traduit en français sous le titre: Le cygne noir - La puissance de l'imprévisible.

En chair et en plumes, le cygne noir est un animal que l'on croyait inexistant jusqu'à ce qu'un spécimen soit aperçu en Australie. L'apparition d'une seule de ces bêtes a détruit en un instant la certitude séculaire voulant qu'un cygne soit nécessairement blanc...

 

À partir de là, la thèse de Taleb, lointaine cousine de la théorie du chaos, édicte ceci. L'histoire n'est pas définie par une continuité d'événements plus ou moins prévisibles, mais plutôt par des chocs abrupts totalement hors de l'ordinaire, échappant à toute prédiction et dont l'effet est de grande magnitude.

C'est le fameux «unknown un- known» (l'inconnu inconnu) de l'ex-secrétaire américain à la Défense, Donald Rusmfeld, que celui-ci opposait au «known unknown» (l'inconnu connu). Le premier cas est celui de la révolution fulgurante induite par l'internet et l'informatique en général dans la société; ou celui du 11 septembre 2001. Et ce, par opposition, puisqu'on parle de Rumsfeld, à l'ampleur initialement inconnue que devait prendre le phénomène connu des conflits sectaires en Irak.

Si l'on adopte la théorie de Taleb, qui s'est notamment vérifiée de façon spectaculaire dans le secteur financier, ce qui pourrait vraiment secouer la présidence de Barack Obama serait donc un ou des événements dont on n'a pas la moindre idée au moment où il s'installe à peine dans le bureau ovale.

Secouer en bien ou en mal, d'ailleurs: selon Taleb, il existe en effet de «bons» cygnes noirs.

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Et d'où pourrait venir l'oiseau?

On pense tout de suite à la menace terroriste, qui se présenterait sous une forme inattendue et inédite. Selon le quotidien britannique The Sun, 40 combattants de la filiale algérienne d'Al-Qaeda sont morts de la peste au cours des dernières semaines dans un camp d'entraînement situé à 150 kilomètres d'Alger: manipulation biologique qui a mal tourné? Quelle somme de connaissances est-elle nécessaire pour saboter complètement le réseau informatique mondial? Où et quand apparaîtra la première «bombe sale»? Surtout: quoi encore, qu'on ne soupçonne pas?

À l'opposé, quelle avancée technologique pourrait en quelques mois révolutionner l'industrie verte (sur le modèle de la révolution informatique, justement)? On sait que la recherche est considérable et fébrile aux États-Unis. Faut-il attendre une telle percée dans la capacité de stockage de l'énergie électrique? Dans un produit dérivé de l'ingénierie génétique ou de la nanotechnologie?

Quel cygne noir, oiseau de malheur ou non, pourrait-il apparaître au Proche ou au Moyen-Orient?

Et l'économie, enfin?...

«Alors que nous croyons être maîtres de l'histoire, c'est elle qui dispose de nous», écrit Nassim Nicholas Taleb.